Publié le Mardi 16 novembre 2010 à 18:00:00 par Cedric Gasperini
Les yeux dans l'Ezio
Deux années ont séparées Assassin’s Creed premier et second du nom. Deux années durant lesquelles les développeurs ont remanié, refondu, approfondi et bien amélioré leur jeu. A tel point, finalement, qu’Assassin’s Creed II nous avait très largement séduit et propulsé la série au rang d’incontournable.
Aujourd’hui, un an seulement après la sortie du second opus, voilà qu’UbiSoft nous livre un Assassin’s Creed Brotherhood. On y retrouve Ezio Auditore, le héros du deux, pour de nouvelles aventures.
Même moteur graphique, à peine retravaillé, mêmes personnages, nouvelle intrigue… oui, ça sent clairement le désir de rentabiliser une franchise qui a pris de l’importance et surfer sur le succès du dernier opus. Bref, Assassin’s Creed Brotherhood est très certainement une grosse histoire de sous, à la base. Notez que c’est normal, hein, un éditeur n’est pas un amuseur à but non lucratif. Et aucun n’a jamais sorti un jeu dans l’idée de perdre de l’argent. Et puis, à partir du moment où la qualité est là et qu’un jeu est réussi, à vrai dire… on s’en moque un peu, non ?
Reste à savoir ce que vaut vraiment cet Assassin’s Creed Brotherhood. Et pour le coup, ça tombe bien, on y a joué, on l’a testé, on l’a épluché, on l’a décortiqué, et voici nos conclusions…
Assassin’s Creed Brotherhood commence là où Assassin’s Creed 2 se termine. Pile-poil. Dans la crypte, à Rome, en pleine discussion avec la déesse Minerve (et ce même si c’est l’idée scénaristique la plus ridicule de ces dix dernières années). Pour ceux qui auraient raté cet opus ou ne l’aurait pas terminé, pas de souci, une petite vidéo d’intro vous montre les évènements passés.
Vous fuyez ensuite Rome, en compagnie de votre oncle Mario. Direction le Castel Monteriggioni, qui vous servait de base arrière dans Assassin’s Creed 2. Vous y retrouvez votre mère et votre sœur, ainsi que Caterina, maîtresse de Forli. Outre une visite pour fêter votre retour, cette dernière est surtout venue vous entretenir sur les armées papales, plus menaçantes que jamais. Ce sera l’occasion de lui présenter plus en profondeur vos hommages. Profitez-en, ce sera votre seul moment de répit du jeu.
Quelques évolutions ont été apportées à Monteriggioni : des canons ornent désormais les remparts. Il vous faudra d’ailleurs montrer aux gardes comment s’en servir. Petite nouveauté, aussi, des « ascenseurs » vous permettent d’atteindre plus rapidement les hauteurs. En guise d’ascenseur, il s’agit en fait de contrepoids qui vous propulsent en haut, vous évitant de longues secondes de grimpette. Sympa.
Deux ou trois petites missions vous attendent sur place, histoire de vous remettre doucettement dans le bain.
Mais au petit matin, les armées papales donnent l’assaut, détruisent la forteresse et vous contraignent à l’exil.
Voilà une petite introduction, durant environ quinze-vingt minutes, à peine plus, mais menée tambour battant. Le siège des troupes ennemies est un petit bijou, pourvu que vous preniez le temps de participer pleinement aux attaques sur les remparts ou dans la ville.
Vient ensuite une longue partie durant laquelle vous jouez… Desmond. Ce dernier arrive justement à Monteriggioni pour se cacher et continuer à explorer les souvenirs d’Ezio. Pour ouvrir la grille, il va falloir passer par les catacombes et les égouts. Il va falloir, en compagnie de Lucy, grimper, sauter, tirer des leviers… bref, jouer à Assassin’s Creed pour de vrai, mais avec Desmond dans le rôle-titre. Un long passage fort sympathique, très amusant, et vraiment agréable. De par ses visions, Desmond y verra également comment Ezio et sa famille ont pu s’enfuir du Castel.
Retour dans la peau d’Ezio. Nous voilà désormais à Rome, en présence de Macchiavelli. Et là, l’aventure s’épaissit. En termes de possibilités et de choses à faire. Car il va falloir mettre à mal la mainmise des Borgia sur la ville. Ils font régner la terreur, ont fermé les échoppes, et leurs soldats patrouillent partout.
Pour réussir à vous emparer de la cité, vous décidez de parier sur le peuple. Et il va falloir donc rendre le peuple heureux de vos actions. Cela passera par mettre le feu aux tours de guets des soldats, après avoir assassiné le capitaine du quartier. Dès lors, l’influence des Borgia y sera minimisée. Vous pourrez rouvrir les échoppes et rénover les monuments. Bien entendu, chaque rénovation a un coût. Tout comme chaque bâtiment rénové rapporte un peu d’argent.
N’ayons pas peur des mots : le système a été pompé sur Fable II : un petit élément de gestion, pas très poussé, mais terriblement addictif. On se retrouve rapidement à récupérer la moindre piécette pour espérer rouvrir un tailleur, une banque, un forgeron ou un médecin. Chacun vous coûtera entre 500 et 2000 pièces… quand certains monuments iront jusqu’à 30 ou 40 000… voire 50 000 pour le Colisée.
Au milieu de tout ça, vous aurez une mission principale : libérer les courtisanes, les voleurs et les mercenaires, pour qu’ils viennent vous soutenir dans leur lutte (là aussi, cela passe par la rénovation de leurs bâtiments), puis monter une secte d’assassins en recrutant des hommes, retrouver Leonardo Da Vinci et j’en passe…
Sans parler des missions annexes, toujours aussi nombreuses (assassinats, ou revivre un souvenir de jeunesse d’Ezio…).
C’est bien simple, il y a tant à faire que l’on se retrouve rapidement avec une vingtaine d’heures de jeu sans avoir beaucoup avancé dans l’intrigue. Et je vous rassure, sans s’être ennuyé le moins du monde.
Quelques nouveautés ont été apportées au jeu. Nouvelles armes (l’arbalète) ou objets (parachute), nouveaux mouvements, nouveaux enchaînements (on peut désormais mettre à mort plusieurs soldats d’un seul coup, ce qui donne beaucoup plus de rythme aux combats et les rend nettement plus nerveux et agréables), et j’en passe. Même les grimpettes ont été modifiées : les tours de guet sont parfois une vraie plaie à escalader (il faut de temps en temps se laisser tomber sur l’affleurement inférieur pour reprendre son escalade sur un autre chemin). Pas toujours évident, et des fois à la limite de la crise de nerf.
Pour tout le reste, on retrouve la même ambiance, les rues pleines de monde, les ménestrels collants à frapper, les mendiantes qui font leur grand retour, des discussions improbables et parfois hilarantes entre passants, des soldats soupçonneux et qui ouvrent le feu à tout bout de champs (heureusement, ils sont toujours dotés d’une IA d’huître), des bâtiments à escalader, des monuments superbes, un horizon à perte de vue, des sauts de la foi dans les bottes de paille et j’en passe.
Alors, au final, cet Assassin’s Creed Brotherhood vaut-il le coup ?
Pour sa partie solo, oui. Le mode est long et n’a pas été bâclé. Même s’il n’est pas pour autant exempt de tout reproche.
Par exemple, on rencontre pas mal de bugs graphiques et de collision. Un peu plus de soin à ce sujet aurait été le bienvenu. Surtout dans les cinématiques. Se voir traversé par un cheval en pleine discussion ou voir apparaître d’un seul coup des passants, c’est légèrement troublant. Sans parler des types qui marchent face à un mur, que l'on croise fréquemment...
La trame principale est également nettement moins dense, et finalement moins captivante, que dans Assassin’s Creed 2. De ce fait, certaines quêtes principales ressemblent, tant dans leur intérêt que dans leur profondeur, à des quêtes annexes. Ça manque de puissance scénaristique, quitte à prendre, finalement, un peu plus de libertés avec l’Histoire (avec un grand H).
Un poil déçu, aussi, sur ces fameuses zones pas débloquées que l’on rencontre encore. J’aurais aimé avoir une Rome totalement ouverte.
Heureusement, la ville n’est pas un gigantesque copié-collé : les quartiers sont souvent bien différents les uns des autres et offrent donc une variété bienvenue.
Et au final, les innovations sont assez rares.
Le jeu rebondit un peu avec l’arrivée de vos potes assassins, que vous pouvez former en envoyant en mission en Europe (missions fictives que vous ne jouerez pas). Chaque mission permet de gagner des points d’expérience et de les rendre plus performants. Mais là encore, on aurait peut-être aimé en avoir un peu plus. Et de ce fait, l’idée d’avoir une ribambelle d’assassins à sa botte ne peut que souligner l’absence cruelle de mode coop. Parce que le jeu s’y prêtait merveilleusement bien. Et que se la jouer, comme dans les bandes-annonces faites par Ubi, à débarquer entre potes au milieu d’une caserne de soldats ennemis, ça aurait pu être un vrai bon délire.
Bref, même imparfait et peu novateur, même finalement moins plaisant qu’Assassin’s Creed 2, cet Assassin’s Creed Brotherhood vaut le coup. Pour les fans et les autres. Retrouver Ezio n’a, de toute manière, pas d’équivalent et est un véritable bonheur.
Ajoutez à cela un mode multi. On ne crachera pas dessus puisqu’il offre l’occasion de prolonger l’aventure entre potes. Les modes et le système de jeu ne nous ont pas vraiment convaincus, puisque grosso modo, quand on voit un type courir, c’est un joueur et il faut soit s'en méfier, soit le poursuivre et le tuer (à quelques subtilités près). Que ce soit en solo ou par équipe, le but est d’abattre des cibles à tout bout de champ et éviter que ceux dont vous êtes vous-mêmes la cible n’arrivent à leur fin.
Souvent brouillon, parfois un poil lourdingue, ça reste quand même sympathique et a le mérite d’exister. Deux modes de jeu seulement pour huit cartes, ça reste quand même très faiblard. On espère des DLC bien rapidement pour développer un peu le truc, parce que là, ça sent le sous-exploité à plein nez.
Pour conclure tout à fait, donc, sans avoir l’excellence du deuxième épisode, cet Assassin’s Creed Brotherhood offre avec brio une suite aux aventures d’Ezio. Un vrai petit bonheur de retrouver cette série. C’est tout ce qui compte, non ?