Publié le Mercredi 26 mars 2025 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

Test Wednesdays (PC)

Ça restera notre petit secret...

Y’a des jeux, comme ça, que personne ne veut tester. Quand j’ai débarqué dans la rédac en demandant tout fort qui voulait tester un jeu sur les violences sexuelles, tout le monde a perdu 20 cm d’épaules d’un seul coup, le nez collé à son écran ou son clavier. On aurait même entendu les mouches voler s’il y avait des mouches, sauf qu’on a préféré élever des lézards et donc, des mouches, il n’y en a pas à la rédac.

Je suis donc reparti avec mon jeu sous le bras et je me suis attelé, seul, à la tâche. Bande de lâcheurs.

Développé par The Pixel Hunt en collaboration avec Pierre Corbinais, édité par Arte, le jeu Wednesdays est déconseillé aux âmes sensibles. Mais conseillé par nous, à tous. Il aborde des thèmes très difficiles. Violences sexuelles, inceste, confrontation avec son agresseur… et fait quelques embardées sur l’homosexualité, ou la toute (toutoute) première fois d’une relation sexuelle.

Mais globalement, on en ressort plus en ayant besoin d’un verre de whisky que d’envie de se taper un lait-fraise. Il faut le savoir.

Et pourtant, le message est essentiel. Et si la forme est parfois dure, elle n’est jamais déplacée, voyeuriste ou inutile. Le jeu met en lumière des problèmes réels, bien trop fréquents, bien trop éludés, mal perçus, donc mal compris et dénonce avant tout un problème de communication dans notre société.


Les violences sexuelles existent. Il faut en parler. Ne serait-ce que pour les victimes. Et empêcher qu’elles se multiplient.

Tout commence lors d’un trajet en voiture. Alors qu’un de ses amis raconte l’agression de son cousin par un oncle, Tim va voir resurgir en lui des souvenirs qu’il aurait préférer laisser enfouis.

Tim va relancer un ancien jeu vidéo, façon Theme Park, auquel il jouait alors. A chaque progression, à chaque nouvelle attraction qui sera débloquée dans le jeu, un souvenir va émerger. Certains légers. D’autres pas.
Avec aussi des passages façon visual novel dans lesquels Tim parle avec sa famille. Son père, sa grand-mère, sa mère, une cousine, un ami…
Vous allez découvrir certaines situations pénibles. Tenter d’améliorer les choses pour Tim sans jamais y parvenir. Tenter de libérer cette parole. Tenter de guérir ses souvenirs… Il faut être clair : certains passages vont vous sembler insupportables. Et même si une option permet de les passer, vous ne les passerez pas. Parce que Wednesdays est un mal nécessaire.

Joliment illustré, tout en sobriété, Tim étant représenté avec une tête de « cube » pour l’impersonnaliser et… permettre à toutes et tous de lui mettre un visage, le sien ou celui d’un proche… Wednesdays est une petite claque qui réveille sa vision sur des sujets insupportables, mais qu’il faut supporter pour les combattre.

C’est intelligent. Certes, on aurait peut-être aimé que le jeu aborde plus de sujets, plus d’exemples. Qu’il propose aussi, pourquoi pas, une vision purement féminine. Mais c’est suffisant pour comprendre ce qui peut se passer – ou du moins effleurer ce qui se passe – dans la tête d’une victime. Dans la tête d’un entourage pas toujours disposé à écouter, à entendre, à comprendre et, surtout, à accepter.

Le slogan « pour que la honte change de camp » n’a jamais été aussi véridique. Pour que les victimes ne se sentent plus jamais coupables. Pour que les proches ouvrent les yeux, aussi.

En tout cas, même imparfait, même court (mais suffisant, environ 2h), même incomplet, Wednesdays est intelligent et devrait être impérativement dans la liste des jeux auxquels il faut avoir joué dans sa vie. Mais le plus tôt possible de sa vie. Et c’est cette nécessité, qui guide la note attribuée au jeu.