Publié le Mardi 16 avril 2013 à 12:00:00 par Alexandre Combralier
Le paradis du RPG ?
Le monde du RPG PC est réactionnaire. On voit fleurir un peu partout sur le web, et notamment à travers Kickstarter, nombre de projets RPG old school (Planescape Torment 2, Wasteland 2…) qui nous ramènent au moins une décennie en arrière. Progrès rime désormais avec passé. Et tant mieux. Larian Studios, avec son prochain Divinity : Original Sin, peut se féliciter : le développement du jeu avait commencé alors même que cette vague d’engouement pour les RPG des années 90 n’avait pas pris forme. Une sacrée intuition qui risque fort de profiter à leur prochain jeu, d’autant plus que celui-ci s’annonce tout simplement excellent.
Contrairement aux précédents Divinity, Original Sin remonte donc le temps et revient à une bonne vieille vue du dessus, celle des Baldur’s Gate par exemple, mais aussi des premiers Divinity. Original Sin a donc les airs d’un RPG classique, old school, et il en a aussi la consistance. On explore, on dialogue, on fouille, et on combat au tour par tour. Mais on le fait fort heureusement avec des graphismes bien de 2013, colorés, agréables, fins, en bref charmeurs. De quoi nous faire presque regretter que les développeurs n’ont finalement pas poussé le vice jusqu’à proposer du full 2D, avec graphismes à la main.
Pour résumer l’essence d’Original Sin, et pour vous montrer en quoi son potentiel est réellement immense, je dirais que c’est un mélange entre Baldur’s Gate, Fallout, Planescape Torment et Neverwinter Nights. Comment que de ça quoi comment, examinons chaque rapprochement point par point.
Baldur’s Gate et Fallout tout d’abord : Original Sin s’en rapproche nettement par son système de combat, en tour par tour donc. Comme dans le jeu post-apocalyptique d’Interplay, chaque membre de l’équipe (4 au total, on y reviendra) dispose d’un certain nombre de points d’actions par tour, à dépenser entre attaque, sortilèges et déplacement. Evidemment, cela suffit déjà à donner un tour très tactique à la plupart des affrontements. Mais de surcroît, une multitude de combinaisons s’offre au joueur (geler un adversaire et le faire exploser, l’arroser puis l’électrifier…), donnant une plus grande variété tactique encore à chacun des affrontements. C’est le retour, dans toute sa puissance, du combat old-school.
Classique, comme un Baldur’s Gate, Original Sin l’est encore par ses feuilles de personnages. On est là en terrain connu, avec gestion des inventaires, augmentation des caractéristiques (à employer avec parcimonie, puisque le joueur devrait finir le jeu en étant seulement niveau 20 !), etc. L’exploration s’annonce aussi toute classique : les cartes sont vastes, truffées de tonneaux et de barriques en tout genre à fouiller, et cela alors même que le jeu est en monde ouvert (même si, de fait, le niveau des monstres dans certaines zones plus avancées interdira toute progression sérieuse au joueur). L’interaction avec les divers objets s’annonce enfin très poussée, avec la possibilité de combiner à peu près tout et n’importe quoi. Original Sin a donc la liberté d’un Baldur’s Gate (en particulier du premier).
Là où il se rapproche d’un Planescape Torment, c’est par le soin et la place que Larian Studios a apportés aux dialogues. Certaines quêtes se résolvent ainsi entièrement par elles. Chaque personnage (et même chaque animal, puisqu’il est possible de converser également avec nos amies les bêtes) semble avoir quelque chose à dire, dans des villes et villages bien remplies, et le jeu est parsemé de situations en tout genre, sortes de mini-quêtes ou de récits dans le récit qui font le sel d’un RPG : vous donner l’impression d’évoluer dans un véritable monde vivant, et l’envie de vous y impliquer. Original Sin est donc un jeu où l’on parle, où l’on lit, où l’on fait beaucoup de rencontres. Mais là où Original Sin se distingue de son illustre aîné, c’est par la complexification qu’apporte le versant coopération du jeu.
Il est ainsi fortement conseillé, pour vraiment profiter de l’aventure, d’y jouer à deux, et si possible avec la même personne tout le long. Bien entendu, la coopération augmente encore l’aspect tactique des combats. Toutefois la véritable originalité d’Original Sin se trouve dans les prises de décision amenées par les dialogues : au cours des nombreuses situations et quêtes du jeu, les deux personnages (paramétrables entièrement, sans classe préétablie) que vous incarnerez seront rarement d’accord (le choix de ses opinions est laissé entièrement au joueur, évidemment). Faut-il consommer ou vendre tel ou tel objet ? rester loyal ou bien enfreindre la loi pour gagner plus de pièces d’or ? passer en force tel barrage d’ennemis ? Etc, etc. S’il y a conflit, et si tout le monde campe sur ses positions, ce seront les caractéristiques de chaque personnage qui règleront la situation. Voilà quelque chose que l’on attendait depuis bien longtemps d’un RPG de cette ambition. Liberté dans l’exploration, liberté dans la résolution des quêtes : un cocktail dont on connaît l’excellent goût.
Dans notre belle liste de RPG cultes dont Divinity : Original Sin, reste Neverwinter Nights. Le jeu est resté célèbre pour son puissant éditeur de niveaux qui permettait de créer de nouvelles campagnes. Bingo, Original Sin proposera la même chose, en mieux : l’éditeur qui sera proposé aux joueurs est le même qu’ont utilisé les développeurs pour créer la campagne principale. Si la communauté suit, on aura donc là potentiellement de quoi faire Original Sin un jeu à la durée de vie infinie. D’autant que la richesse du système de dialogues du jeu laissera la voie libre à bien d’esprits imaginatifs.
Divinity : Original Sin a donc tout du RPG culte, vraiment. Pour l’être, il devra d’abord proposer un scénario mémorable, ce dont il est impossible de vérifier sur une présentation qui ne s’attardait pas, et pour cause, sur la résolution d’une longue quête principale. Il devra ensuite proposer une réelle densité de jeu. C’est pour cela que Larian Studios a décidé de lancer une
campagne Kickstarter pour Original Sin : non pas parce qu’ils manquent de fonds pour finir le jeu, mais pour le rendre plus riche, plus dense, en ajoutant des cavernes, des donjons, des monstres, des quêtes, mais aussi des vrais backgrounds aux deux mercenaires (anonymes pour le moment) que le joueur peut embaucher pour compléter son duo initial.
Une campagne qui a abouti puisque le cap des 400 000 dollars a été dépassé et permettra de donner les moyens à Larian Studios de concrétiser pleinement ses ambitions. Et même dans le cas où le résultat final ne serait pas tout à fait à la hauteur de nos espoirs, l’éditeur de Divinity : Original Sin promet de faire de lui un achat indispensable pour tout vrai fan de RPG. Les meilleurs ingrédients du passé, les outils du futur et la même passion toujours présente d’un studio pour le jeu de rôle : pas de doute, Divinity : Original Sin a tout d’un grand et vous serez bien mal inspirés de ne pas y croquer le moment venu.