Publié le Dimanche 19 juillet 2015 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du dimanche

London calling

Vous ne l’avez peut-être pas remarqué, parce qu’après tout, le site peut tout à fait vivre sans moi, et c’est tant mieux, mais je me suis absenté trois jours cette semaine. Trois jours pour une virée londonienne en famille. C’était l’occasion de faire découvrir cette ville que j’adore à mes gamines.

Bon. Ça a été un enfer. Si, si. Partir avec des gamins, vouloir les faire s’intéresser à autre chose que la célèbre boutique de jouets Hamleys, essayer de leur faire comprendre que Big Ben est un monument sublime, que le Tower Bridge a fier allure sur la Tamise, que arrête de faire la gueule non tu n’auras pas cette peluche immonde de nounours habillé en garde anglais, que Buckingham Palace en jette ou que la Cathédrale de Westminster est majestueuse ou encore que la National Gallery regorge de merveilles, c’est un vrai chemin de croix.

Mais après tout, ce n’est qu’un détail.

Aller à Londres, aujourd’hui, c’est finalement, plus qu’un plaisir, une vraie leçon d’humilité pour nous autres, péteux de français. Ah ça, on peut se pavaner. On peut se la péter et se comporter comme la première puissance mondiale. Puissance intellectuelle, puissance culturelle, puissance sociale, puissance tout ce que vous voulez. Mais à bien y regarder, nous ne sommes quand même qu’une vraie grosse bande de branleurs ridicules.

Chaque voyage à Londres est pour moi une plongée dans une vraie ville cosmopolite. Ah ça, c’est clair, ils ont une conception parfois toute particulière de la mode. Les robes d’été avec les baskets, perso, je n’arriverai jamais à m’y faire. Mais en plein centre de Londres, on croise des punks, des cheveux verts, des crêtes violettes, des types qui se baladent en chantant Hare Krishna, des cheveux roses fluos, des Doc Martens éventrées sur des collants déchirés, des boucles d’oreilles qui ont migrées sur tout le visage… et tout le monde trouve ça tout à fait normal. Tout ce petit monde semble cohabiter sans haine, sans rejet, sans histoire, sans mise à l’écart. Dans le métro, les gens se lèvent pour laisser la place assise à mes gamines. Personnellement, je n’ai jamais vu ça une seule fois à Paris. Un punk parisien, il se fait fusiller du regard et les gens changent limite de trottoir.

Londres est une ville propre. Pas de déjections canines sur chaque mètre de trottoir. Pas de papiers qui jonchent les rues. Pas de tags sur chaque mur. Pas de chewing-gums sous les semelles. C’est le résultat de dizaines d’années de lutte contre l’incivilité. D’amendes ultra-salées.
Londres est une ville riche. Il n’y a pas à dire, le niveau de vie est nettement supérieur au nôtre. La récente chute de l’euro y est certes pour quelque chose, mais on se rend quand même compte que le fossé ne cesse de grandir.
Londres est une ville où le métro fonctionne. Bien. Parce que le prendre plusieurs fois dans la journée sans aucun souci, avec des rames très régulières, ne pas attendre plus de 3 minutes entre chaque… et rentrer à Paris pour se retrouver coincé une demi-heure suite à un « problème de signalisation », on a juste envie de faire un massacre de masse chez les employés et patrons de la RATP.

Bref, Londres est une ville passionnante. Agréable. Mieux encore : preuve de l’économie florissante du pays, elle a lancé une énorme vague de rénovation de bâtiments. Londres est un gigantesque chantiers, quand en France, le secteur du BTP prend de plein fouet une crise qui n’en finit plus et que le gouvernement semble incapable d’endiguer.

Alors certes, tout n’est pas tout rose à Londres. Personnellement, je pleure chaque fois la perte des méga stores culturels (HMV, Virgin, Zavvi…). Et il ne faut pas croire que la ville est dénuée de tout problème, tout souci, toute agression, tout rejet…
Mais globalement, à bien y regarder, il est clair que les français auraient tout à gagner à s’inspirer, pour une fois, de leurs ennemis ancestraux. Parce qu’aussi, nos cafés parisiens, leurs serveurs malaimables et leurs ambiances poivrots piliers de comptoir n’auront jamais la magnificence et la classe des pubs anglais. Parce que celui qui se considère comme le Pays des Droits de l’Homme et le Pays de Liberté d’Expression n’aura jamais son Speaker’s Corner de Hyde Park, Kennington Park ou Victoria Park, pour ne citer qu’eux. Et que leur parti d’extrême-droite, eux, a recueilli moins de 2% des suffrages aux dernières élections.

Et puis merde. Nous, on n’a jamais eu les Sex Pistols ou les Clash. On a Louane ou Maître Gims à la place…