Publié le Vendredi 22 juillet 2011 à 12:00:00 par Cedric Gasperini
Pero que es esta mierda ?
Si je n’ai jamais été franchement fan de la licence Call of Juarez, je dois avouer que les deux premiers jeux n’étaient pas pour autant déplaisants. Trop dirigistes, une jouabilité un poil lourdaude, un scénario bas-de-plafond et des artifices grossiers, certes. Mais pas déplaisant pour autant.
Seulement voilà, au fil des présentations et des prises en main, ce Call of Juarez : The Cartel apparaissait préoccupant, voire limite daubesque… A tel point que, finalement, peu convaincu par ce que j’en voyais, j’ai préféré me taire et ne pas écrire de preview pour ne pas sombrer dans le catastrophisme et laisser sa chance au produit : qui sait ? Parfois des previews très moyennes ont accouché de jeux vraiment sympathiques…
Aujourd’hui, toutefois, pas de retenue. La version test de Call of Juarez The Cartel est entre nos mains. Une version finale, en boîte, identique à celle que vous trouverez dans le commerce. Il est donc temps de vous dire ce que nous pensons sur ce produit. Quoi que… le mot « produit » est peut-être erroné. On devrait, pour le coup, parler « d’ersatz » de produit. De « résidu » de développement. Bref, comme vous allez pouvoir vous en rendre compte en lisant ces lignes, ce n’est pas un jeu. Ce n’est pas un divertissement. Ce n’est pas un loisir. C’est un furoncle, une régurgitation vomitive, bref, une merde.
Allez, en selle…
Générique, ouverture. Directement, on tombe sur… une poursuite en voiture. Dès ces quelques secondes de préambule qui vous plongent en pleine action, le ton est donné. C’est de l’avarié en barre… Vous sortez à moitié de la voiture par la fenêtre pour tirer sur vos poursuivants situés derrière vous et sur le côté opposé… sauf que c’est impossible de se retourner ou de viser sur le côté opposé. Il faut impérativement viser devant vous ou sur votre côté sous peine d’être replongé automatiquement dans la voiture. Après cinq ou six essais infructueux et autant de retour sur la banquette, alors que les mots « mais c’est quoi ce bordel, c’est une blague ou quoi ? » vous viennent aux lèvres, les ennemis dépassent votre véhicule et vous pouvez – enfin – leur tirer dessus. Sans conséquence : vous ne pouvez les abattre puisque c’est juste un préambule, une mise en action qui va vous replonger plusieurs jours auparavant avec un « voilà ce qui s’est passé avant ».
Retour en arrière, donc, pour savoir ce qui vous a amené à vivre cette poursuite en voiture. Pour le coup, vue sa qualité, on serait tenté de dire qu’on n’est pas pressé de découvrir les faits… mais bon, il faut bien le tester ce jeu, alors on continue quand même.
Le pitch rapide : exit l’ambiance cow-boy. Nous sommes de nos jours, aux USA. Parce que la DEA (Drug Enforcement Administration) s’intéressait un peu de trop près à ses activités, un cartel mexicain a fait péter une bombe dans leurs locaux. Résultat, une pagaille d’enfer, des dizaines de morts et une guerre imminente : les USA sont sur le point de débarquer des troupes à Juarez, là où le cartel a élu domicile, pour venger la mort de ses citoyens. Le Mexique voit cette invasion d’un mauvais œil et promet des représailles si elle a lieu.
Le gouvernement US décide alors de monter un trio de choc qui aura carte blanche pour se débarrasser des revendeurs de drogue. Un agent de la DEA qui a survécu à l’attentat, une agent du FBI et, comme chef, un flic de choc du LAPD, Ray McCall, descendant des héros des précédents volets de la série.
Chaque mission peut être jouée seul ou jusqu’à trois en coop. Dès lors, des petits défis, plutôt inintéressants, sont proposés, comme récupérer de l’argent pour sauver une pauvre fille. Ces défis doivent être faits à l’insu de vos partenaires. Ce qui amène à des situations cocasses quand deux joueurs sont dans la même pièce, avec leur défi à remplir à portée de main, mais qu’ils ne peuvent pas le faire sous peine d’être repéré par leur coéquipier… Quoi qu’il en soit, ces défis n’apportent strictement rien à l’histoire et seront gentiment ignorés pour se focaliser sur le scénario principal.
Le jeu en coop est assez calamiteux. Trouver des joueurs avec lesquels vous vous entendez bien, qui se comportent correctement, qui vous attendent quand il le faut, qui jouent « en équipe » et non pas individuellement est carrément mission impossible. Reste que… vue la qualité du jeu, c’est peut-être, quand même, le seul moyen de prendre un peu de bon temps…
Forêt, banlieue, boite de nuit, canyon… vous allez visiter différents endroits, combattre plein de types armés jusqu’aux dents, jouer du sniper, du fusil, de la mitrailleuse, du flingue, de la grenade dont l’aire d’effet, comme celle des explosifs, est d’environ un mètre carré (et encore…). On appelle ça de la grenade inoffensive, à la limite. Et parfois aussi, vous conduirez des voitures (si vous jouez seul, sinon, vous pourrez prendre la place du passager sur le siège arrière pour tirer sur les ennemis). Les effets d’explosion sont ridicules. Tirer trois fois sur les pneus d’une voiture la fera exploser. Tirer dans ses fenêtres aussi. Allez comprendre.
Le jeu est toujours aussi scripté, les évènements se déclenchant au fil de votre progression, parfois de manière illogique. Du genre à entendre des ennemis se dire qu’il doit y avoir un truc louche parce qu’ils n’ont plus de nouvelle de leurs potes, alors que vous venez de faire un gros gunfight bien bruyant à dix mètres de là… et à réagir d’un seul coup en vous voyant arriver… alors que vous avancez pas à pas à couvert d’une succession de gros rochers…
La conduite quant à elle est calamiteuse. La vue est celle du cockpit uniquement, mal faite, cachant la grande partie du parcours… résultat, on conduit plus au jugé qu’autre chose. Mention spéciale pour les 2-3 voitures qui sont apparues « comme par enchantement » sur la route devant nous pendant le test… Reste que les sensations de conduite sont catastrophiques et l’intérêt de tels passages, nul.
L’IA est tout bonnement catastrophique. Outre les ennemis qui visent parfaitement à travers les plantes, et qui vous visent surtout vous, plus que vos coéquipiers, ils opèrent toujours la même routine : se cacher derrière un obstacle, se mettre à découvert pour tirer, courir vers une autre cachette, s’arrêter en plein milieu de la course pour vous tirer dessus…
L’IA de vos coéquipiers reste tout de même la pire de toute : entre les moments où ils appellent à l’aide et vous demandent où vous êtes alors que vous vous tenez à leurs côtés et qu’il n’y a plus de danger, et les moments où ils veulent se mettre au même endroit que vous donc vous poussent de l’abri derrière lequel vous étiez planqué, les raisons d’enrager sont multiples. Et ça arrive plus souvent qu’on ne le croit. Du style 2-3 fois, voire plus, par niveau. Ajoutez le fait qu’ils balancent en boucle les mêmes phrases et quasiment jamais au bon moment, et vous aurez sans doute ce qui s’est fait de pire dans toute l’histoire du jeu vidéo.
Graphiquement, le jeu est moche. Outre l’abus du flou, utilisé à tort et à travers, notamment en visée, pour éviter que le jeu ne rame encore plus, on a le droit à des textures hideuses, des animations ratées, des cinématiques à vomir… Le flou est d’ailleurs tellement omniprésent qu’il vous empêche de voir les ennemis à plus de quinze mètres et le jeu se résume à des gunfights quasiment au corps à corps. C’est terriblement gênant et flingue grandement la jouabilité.
Mention spéciale à la boite de nuit où les strip-teaseuses sont terriblement hideuses. Alors que l’on aurait pu évoluer dans un décor de charme, on se retrouve dans le musée des horreurs. Ça donne furieusement envie de tuer les gens, notamment les passants (dont les modèles se répètent fréquemment, donnant l’impression de progresser dans un monde de clones tous habillés de la même manière), chose toutefois impossible puisque si vous abattez trop de civils, c’est le « game over » direct.
Bon. Déjà, vue la description faite du jeu, on est plein marasme. En pleine catastrophe. En plein tsunami diarrhéique. Mais je vous rassure, le pire reste à venir.
Techniquement parlant, le jeu est totalement, indubitablement, à la ramasse. Sans doute a-t-il été développé avec des moufles. C’est que Techland, c’est en Pologne. Et en Pologne, on se les pèle. Ceci explique peut-être cela. Mais à ce niveau d’optimisation foireuse, ça mériterait un oscar.
Testé sur une PS3 Fat (première génération) qui ronronne encore parfaitement, qui n’a jamais eu aucun problème sur aucun jeu, Call of Juarez rame comme un arthritique dans une chaloupe. Le jeu se bloque régulièrement pendant des demi-secondes, plantant votre visée, gênant votre progression, bousillant votre trajectoire de conduite… Et ce n’est pas « une fois de temps en temps ». C’est quasiment une fois toutes les vingt secondes. C’est pire quand on « zoome » pour viser. Même les sons sont coupés à certains endroits ! Et même les cinématiques, pour la plupart hideuses et mal animées, rament également.
Si le jeu n’a pas été testé sur une PS3 Slim, nous avons tout de même pris la peine de questionner plusieurs personnes qui ont acheté le jeu sur Xbox 360 pour savoir si nous devions directement lancer un contrat sur la tête des développeurs. Parce que le problème est tel sur PS3 qu’il en est totalement injouable. Et du coup, on s’inquiétait de savoir si Ray Charles – paix à son âme - avait été en charge du contrôle qualité du jeu ou non.
Selon les retours donnés par les personnes questionnées, le jeu est plus fluide sur Xbox 360. Si quelques gels d’écran subsistent, ils sont nettement moins nombreux et leur rareté ne nuit pas, finalement, à la jouabilité globale.
Par contre, et c’est le cas aussi sur PS3, dès que l’on zoome pour tirer, voire que l’on veut avancer en zoomant, la fluidité du jeu en prend un sacré coup derrière les oreilles. Le framerate tombe sous les 25, voire sous les 20 images secondes. Mais comme de toute manière, le jeu est totalement flou (zoom comme environnements), on avance en ne voyant qu’à moitié donc ça ne change pas grand-chose.
On notera aussi de nombreux bugs (ennemis qui traversent les murs), un aliasing omniprésent et des personnages, objets, décors ou véhicules qui apparaissent d’un seul coup devant vous très régulièrement : un tel clipping, on n’avait jamais vu ça depuis David Copperfield.
En fait, la seule chose potable dans le jeu est le doublage. Non pas que la synchronisation labiale soit bonne, loin de là, mais les voix sont plutôt bien faites. Mal exploitées, notamment en raison de dialogues souvent convenus et inintéressants, stupidement vulgaires et tellement répétitif qu’on a l’impression que le dictionnaire des traducteurs ne comprenait que 50 mots, mais avec du caractère et bien jouées. C’est déjà ça.
Notez que chaque mission pourra se rejouer avec un personnage principal différent, donc trois fois. Ça ne change strictement rien au jeu en lui-même et les différences entre chaque sont minimes (à part les défis annexes, tellement inintéressants qu’on s’en fout, en fait). Le jeu étant tellement mauvais, refaire les missions relèvera donc de la maladie mentale profonde.
Destiné au coop avant tout, il ne mérite même pas de pourrir la vie de potes pour les inviter sur une partie. Et surtout pas de leur faire dépenser de l’argent pour ce machin. D’autant plus que les deux autres modes multi, à savoir un team deathmatch classique ou des objectifs à remplir par équipe (une équipe joue les bandits, l’autre les flics) sont tout sauf intéressants, répétitifs, dans des cartes assez mal faites.
Bref… Est-il nécessaire de poursuivre ce test ? Rien n’est à sauver dans ce Call of Juarez The Cartel. En quittant l’ambiance western, les développeurs se sont embourbés dans un marasme vidéoludique. Une réalisation indigne, honteuse, lamentable. Même vendu à 45 €, le jeu est une véritable arnaque. Le genre qui donne envie de faire mal aux développeurs, à leur famille, à leurs proches. Cette réaction peut paraître choquante, barbare, violente, indécente, déplacée. Entre nous, ce sont eux qui ont commencé.