Publié le Dimanche 29 novembre 2015 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du dimanche

Morosité ambiante

Plus les jours passent, plus mes constations se confirment, s’amplifient, me plongeant dans une sorte de désolation, de consternation affligée.
J’expliquais, la semaine dernière, dans l’édito du dimanche, que Daesh avait finalement bel et bien remporté la bataille – si ce n’est la guerre – malgré les déclarations patriotiques et les promesses de nos concitoyens. La France toujours debout face au terrorisme. Unie face à la barbarie. Forte face à l’oppression.

Mon cul, oui.

Notre nation n’est finalement composée que d’une poignée de couilles molles et de pétochards. Quelques attardés mentaux équipés de bombes et de kalachnikov ont réussi à mettre à genoux 70 millions de personnes.

C’est triste.

Jetez un œil autour de vous. Je ne compte plus les Noël de Comités d’Entreprises annulés. Sous l’influence des syndicats qui voient en chaque barbu une menace potentielle, les fêtes, les sorties au cirque, les sorties dans les parcs d’attraction sont annulées les unes après les autres.
Alors certes, ça fait sans doute vendre plus de rasoirs. Mais des milliers de personnes se retrouvent sur la paille. Dans une merde noire. Un manque à gagner énorme.
Ajoutez les marchés de Noël qui ne se feront pas. Et autant de commerçants qui n’écouleront donc pas leur marchandise. Vendre du pain d’épice, c’est sympa. Mais être obligé de s’en taper matin midi et soir pour écouler tout son stock de fin d’année, ça doit juste donner envie d’aller plastiquer des ruches, au final.
Et ces marchés de Noël ou autres fêtes d’hiver qui se terminaient traditionnellement par un feu d’artifice, on en parle des interdictions de réunion sur la voie publique et interdiction d’utiliser des pétards ? Du coup, les artificiers sont eux aussi victimes de la frilosité ambiante.

Il n’a jamais été aussi facile de trouver des places de concert à bas prix dans la région parisienne. Les salles sont désertées.
Même les centres commerciaux sont à la peine. S’il y a toujours du monde – les courses de Noël sont inévitables – il semblerait que l’affluence ne soit en rien comparable aux années précédentes.

Les gens restent chez eux. Cloitrés. Paniqués. Persuadés que derrière chaque musulman se cache un terroriste potentiel. Les agressions raciales explosent. La moindre djellaba est pointée du doigt avec haine et dégoût.

C’est peut-être ça, finalement, le plus déprimant. L’état de la France. L’état des français. Qui ne manqueront sans doute pas de se ruer dans les urnes dimanche prochain pour un énième coup de pouce au parti d’extrême-droite. Parce qu’il y en a marre de tous ces bougnoules qui ne sont pas comme nous et qui tuent nos enfants et piétinent nos valeurs. Parce que pour vivre heureux, vivons cloîtrés. Fermons nos frontières. Jetons tous ces salauds d’étrangers à la mer. Torpillons les boat-people. Enculés d’immigrés, tiens.

Ben ouais. Mais moi, perso, Gasperini, ce n’est pas très français, comme nom. Et y’a un « enculé d’immigré » transalpin qui a un jour pris son bâton de berger et franchi les montagnes avec sa moumoute en poil de chèvre, son pantalon en laine et son petit chapeau en feutre. Avec une petite Heidi qui lui courait dans les pattes, sans doute. Enfin un truc comme ça.
On peut me parler de français « pure souche ». Moi, la France, ça me fait penser à un jardin. Et ce sont les multitudes d’espèces de fleurs qui en font la beauté. Alors qu’une souche, dans un jardin, généralement, ça casse le cul de tout le monde et il y a alors deux solutions : soit on l’arrache, soit on l’embellit. Par exemple avec des ornements de fleurs diverses et variées, de plantes exotiques d'origine diverses et variées. La comparaison est mièvre, certes, mais je vous laisse la digérer quand même.

Vous le savez au fil des éditos parus ici. Au fil des news. Au fil des coups de gueule. Nous luttons sans cesse contre l’ignorance. Contre l’intolérance. Contre la violence. Contre la stupidité. Contre le rejet. Une lutte sans fin. On a parfois un peu l’impression de pisser dans un cours d’eau pour en faire monter le niveau, si j’osais l’expression. Mais on ne sait jamais.

Je terminerai cet édito déprimant, déprimé, par une petite réflexion sur l’hommage aux victimes des attentats. Selon la presse unanime, il était émouvant. Bien. Cet hommage était nécessaire. Juste une petite chose, les gars. Si un jour je me fais buter lors d’un concert rock et que pour un hommage, vous me collez Camélia Jordana et Nolwenn pour chanter une chanson à mon enterrement, je vous préviens, je sors du cercueil et je bute tout le monde.