Publié le Mercredi 25 janvier 2012 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

Anonymous : Mais qui sont vraiment ces stars du moment ?

Des types en jupette et avec un casque, puisqu'ils sont légion...

L'année dernière, l'attaque du PSN par les Anonymous n'avait que peu mobilisé la presse. Ce qui touchait pourtant des millions de personnes n'avait eu l'écho, dans les journaux télévisés ou papier, qu'à quelques lignes de-ci de-là. La fermeture de Megaupload et son rapport avec le téléchargement illégal, par contre, a offert aux Anonymous une tribune totalement inespérée en France.

Il est d'ailleurs, soit dit en passant, à noter qu'il s'agit du seul pays à traiter autant de cette affaire.

Chaque quotidien, chaque hebdomadaire, chaque site Internet, chaque journal télévisé et tout un tas d'émissions traitent désormais du sujet : Qui sont les Anonymous ? Que veulent-ils ? Sont-ils dangereux ? Quelle est la portée de leur message ? Le téléchargement illégal est-il inévitable et quelles solutions peut-on y apporter dans l'avenir ?

Journaux télévisés, débats (notamment hier soir sur France 3, l'émission Ce Soir ou Jamais animée par Frédéric Taddeï), chacun y va de son avis, de ses experts, de son point de vue.

Qui sont les Anonymous ?

Certains les comparent à des gamins mal élevés qui n'ont plus de repères sociaux et légaux et s'amusent à défier l'autorité. Autrement dit, avant on cramait des bagnoles, aujourd'hui on crame des sites : Gestes différents mais méthodes comparables.
D'autres les considèrent comme des anarchistes, de simples bidouilleurs, pas forcément de génie soit dit en passant, mais qui organisent des sortes de "sit-in" virtuels, et par leurs attaques protestent et tentent d'imposer leurs idées.
Enfin, d'autres encore voient en eux la nécessaire opposition à l'Etat et à l'Industrie qui tente de faire main basse sur Internet et d'en brider les libertés.

Tout dépend de son point de vue et du soutien qu'on leur apporte, en fait.

Ce que l'on sait, finalement, des Anonymous, est qu'ils viennent de tous les pays. C'est un groupuscule désorganisé, sans vrais chefs, qui refuse toute structure définie. Du coup, un peu tout le monde se réclame d'Anonymous... Et à coups d'annonces et de démentis, ils ont du mal à se trouver un vrai visage.
En parlant de visages, d'ailleurs, ils se cachent derrière un masque de Guy Fawlkes, comme dans la bande-dessinée V pour Vendetta où un anarchiste combat le pouvoir tyrannique en cachant son identité. Pour information (et culture), Guy Fawkes est un conspirateur de la fin XVIème, début XVIIème siècle, qui tenta d'assassiner, avec ses accolytes, le Roi d'Angleterre dont la politique, notamment en matière de religion, était jugée intolérante. L'assassinat fut manqué et Guy Fawkes torturé puis exécuté. Fermez la parenthèse que je n'avais d'ailleurs pas ouverte.

Revenons aux Anonymous.
Ces hackers tentent d'imposer leur vision d'Internet, mais pas seulement : ils n'hésitent pas à s'immiscer dans les affaires politiques (printemps arabe notamment) en soutenant certains mouvements, mais aussi dans les affaires judiciaires (Megaupload, Wikileaks...) ou sociales (attaque de la scientologie, publications d'informations sur des pédophiles...).
Enfin, ils n'hésitent pas à "employer" de simples Internautes en leur fournissant programmes et explications pour les aider à mener ponctuellement leurs attaques. 
Dans leurs rangs, toutefois, on trouve des hackers suffisamment doués pour pénétrer des bases de données et passer outre les protections. Mais leur force ne vient pas de leur "génie", mais de leur nombre : comme ils le disent, ils sont Légion.

Bref, ce sont des "manifestants" qui utilisent le net et l'attaque de sites Internet, voire le piratage, pour faire passer leurs idées.

Cyberdélinquants, cyberterroristes... chacun choisira sa propre définition pour les qualifier.

Que veulent-ils ?

Justement, leur désorganisation brouille singulièrement leurs messages. Et on retrouve la "patte" Anonymous un peu partout. Ou du moins la majorité des actions menées sur Internet sont signées, un peu à tort et à travers, Anonymous. Il y a donc à prendre et à jeter, et à être relativement prudent avant de les rendre responsables d'une action ou d'une autre. La preuve avec l'attaque du PlayStation Network qui ne leur a été attribuée que tardivement l'année dernière. Eux-mêmes avaient d'ailleurs démenti, dans un premier temps, en être à l'origine.
Le fait est qu'ils ont une vision particulière de la liberté et du droit sur Internet. Et tant pis si cette liberté bafoue des lois. On pourrait globalement dire qu'ils sont pour qu'Internet soit une sorte de No-Man's Land où "chacun fait c'qu'il lui plait" et surtout où les Etats et la Justice n'ont pas à s'immiscer.

Sont-ils dangeureux ?

Oui et non. Avouons que le blocage de certains sites comme celui de l'Elysée, Hadopi, CBS, Universal, et j'en passe, est plutôt inoffensif. Le blocage du site de l'Express en représailles du discours tenu par son Directeur de la Publication également, n'était pas bien terrible, même si s'attaquer à la presse est, toujours, totalement condamnable. Il est à noter, d'ailleurs, que certains membres d'Anonymous ont dénoncé cette attaque, preuve de leur plus totale désorganisation.
Maintenant, si ces blocages de sites, lancés par déni de service (en gros, ils lancent des tonnes de requêtes sur un site qui, du coup, se retrouve surchargé et donc innaccessible) sont pénibles mais pas réellement méchants, certaines autres actions sont nettement plus criticables.
Obtenir les informations bancaires d'Internautes ou des informations privées et les mettre à la disposition de tout un chacun est largement plus condamnable. Et peu importe qu'il s'agisse d'informations de patrons à la morale douteuse ou non (selon les principes des Anonymous).

Bref, ils ne sont généralement pas dangereux, mais peuvent l'être vraiment.

 Quelle est la portée de leur message ?

Si les Anonymous trouve un certain écho en France, où certains Internautes les considèrent comme des Robins des Bois, leur message reste toutefois très limité.
En fait, ils n'ont rien de Robins des Bois, loin de là. Sinon mon propre compte en banque serait, grâce à eux, un peu plus garni. Et le vôtre aussi.

Toutefois, et surtout en cette période de crise, leur action trouve un certain écho : Pourquoi fermer un site qui héberge du contenu illégal alors qu'une banque qui blanchit de l'argent sale se fait simplement, de temps à autres, taper sur les doigts ? Pourquoi l'Internaute est sanctionné pour télécharger une oeuvre et risque, en théorie (en pratique les peines plancher ne sont jamais mises en pratique), plus que certaines activités criminelles ? Pourquoi ces lois sont poussées par des sociétés millionnaires qui ne font aucun geste ni aucun effort pour les Internautes et ont complètement raté par leur conservatisme le tournant du numérique ? Et j'en passe et j'en oublie.
Bref, en ces temps de difficultés diverses et dans un pays comme la France où on aime mettre à mal les nantis et le pouvoir, certains sont tentés d'apporter aux Anonymous leur soutien. 

Il n'empêche que, de leur côté, les Anonymous se contentent de vouloir imposer leurs visions et leurs idées en "terrorisant" les populations. En menaçant. On en reste à "si vous soutenez cette loi, nous vous attaquerons" ou "si vous faites ci, nous vous détruirons". Ils utilisent d'ailleurs parfois des termes assez durs, explicant qu'ils vont "détruire" ou "couler" des sociétés. On est, finalement, à deux doigts du terrorisme. Cyber-terrorisme, bien entendu, puisque violence physique il n'y a pas. Mais la violence verbale est bien là.
Bref, leurs méthodes, bien que différentes, sont finalement comparables à celles qu'ils dénoncent : absence de concertation, de débat, d'échange d'idées.

C'est aussi l'une des critiques les plus fréquemment rencontrées à leur encontre : quel que soit leur message, ils ne débattent pas, ne discutent pas, et avancent masqués. Ils n'ont donc aucune légitimité légale ou sociale. Leur message ne peut donc qu'être ignoré par les pouvoirs et, donc, leur portée proche du néant.

Le téléchargement illégal est-il inévitable et quelles solutions peut-on y apporter dans l'avenir ?

C'est finalement un autre débat.
Si le téléchargement illégal, désormais initié et répandu chez la majorité des Internautes, semble inévitable, les solutions sont bien plus difficiles à trouver pour détourner les pirates de ces oeuvres gratuites et facile d'accès.
Le libre accès contre une forte taxation des FAI et du matériel (lecteurs mp3, disques durs...) est souvent évoqué. Mais totalement utopiste, finalement. Parce que comment répartir les sommes selon les ayants-droits ? Sans compter que cette pratique mettrait un peu plus en péril des industries (et donc des emplois) : les boutiques culturelles, les fabricants, imprimeurs... tous ces secteurs seraient durement touchés. Le jeu en vaut-il la chandelle ? Sans doute pas.
Il faudra donc plutôt, selon nous, lorgner du côté des baisses des prix des offres. Une disponibilité plus rapide, plus diversifiée et moins chère sur Internet... bref, enrichir les offres et baisser les coûts, voire même offrir quelques bonus (making-of offert en téléchargement, reportages bonus...) pour faire revenir les Internautes vers la légalité.

Encore faudrait-il, désormais, que les industries touchées par le piratage sortent de leurs carcans et enlèvent leurs oeillères pour se rendre compte que les pirates ne sont pas tous des débauchés sans scrupules qui méritent la prison... Et ça, c'est loin d'être gagné...

Voilà donc, de manière générale, ce que l'on peut dire sur les Anonymous et sur cette affaire qui secoue le Net actuellement. 
N'étant pas experts en la matière, nous ne saurions, via cet article, faire force de loi. Et sommes ouverts, bien entendu, à toute discussion, ajout de précisions ou modifications, selon les informations qui pourraient nous être apportées par les uns ou les autres, pro ou anti-Anonymous.

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