The Walking Dead (PC, Xbox 360, PS3, iPad, iPhone)

 

Publié le Lundi 24 décembre 2012 à 12:00:00 par Alexandre Combralier

 

I'll miss you

imageIl y a quasiment un an jour pour jour nous testions Jurassic Park : The Game. L’impression finale fut plus que mitigée. Certes, le jeu de Telltale Games disposait d’un scénario immersif, prenant, plaisant. Mais que de lourdeurs dans le gameplay ! L’intrigue du jeu, ses développements, ses rebondissements, devait tout faire oublier. Peine perdue. Jurassic Park n’était pas un bon jeu. Telltale avait voulu dans Jurassic Park ériger les QTE en gameplay à part entière, là où ils ne devaient qu’aider à dérouler insensiblement le fil d’un récit prenant. Il aurait fallu que son scénario soit vraiment culte pour faire oublier son gameplay ô combien fastidieux. Cependant on y sentait un potentiel. Si Telltale avait revu sa vision des QTE, si Telltale s’était vraiment lâché sur le scénario, qu’est-ce que cela aurait bien pu donner ? La réponse est simple : The Walking Dead.

L’expérience de Jurassic Park a porté ses fruits : Telltale a pris acte du fait qu’il ne faut surtout pas essayer de compenser la faiblesse du gameplay de son jeu en le surchargeant de QTE inutiles. Car dans « Telltale » il n’y a ni « Play » ni « Game ». Impossible d’être pris au dépourvu : Telltale ne développe pas réellement des jeux vidéo, mais des films interactifs. The Walking Dead mérite à peine de faire partie du genre du point & click. Il n’y a pas vraiment d’énigmes dans The Walking Dead, à peine des petits casse-têtes à résoudre qui se résument bien vite à trouver un objet manquant dans un nombre très restreint de tableaux. Non, le cœur du jeu (puisqu’il faut tout de même le nommer ainsi) réside dans ses dialogues, dans son ambiance, dans ses personnages, bref dans son scénario.

screenscreenscreen

screenThe Walking Dead pose une question simple : si un jeu ne propose absolument rien niveau gameplay, faut-il pourtant l’incriminer ? Chacun pourra avoir son opinion avant d’avoir joué au dernier-né de Telltale, mais tout le monde répondra à peu près la même chose après avoir vu le générique de fin : qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. Et cette ivresse, The Walking Dead la distille magiquement, tout au long de cinq épisodes d’une durée équivalente (soit 2h15 environ, sauf le dernier épisode, plus court d’une vingtaine de minutes). Bien sûr, il y a des hauts et des bas : le premier et le quatrième épisode traînent en peu en longueur, alors que les second et cinquième sont de haute volée, surtout en leurs dénouements. Mais tous concourent à installer un cadre, une atmosphère à nulle autre pareille.

Quintessence du jeu à scénario, The Walking Dead reprend l’univers et les codes du comic du même nom, sans pour autant calquer son intrigue sur son modèle. Il va de soi qu’on ne saurait argumenter longtemps sur l’incroyable puissance du scénario du jeu sans en dévoiler les tenants et aboutissants. Essayons cependant.

screenA proprement parler, The Walking Dead ne dispose pas d’une intrigue alambiquée, faite de grandes révélations et de machinations complexes. Ce ne sont pas même les confrontations avec les zombies qui apportent tout le sel de l’intrigue. L’intérêt des zombies, dans The Walking Dead, est finalement de créer un huis-clos angoissant entre plusieurs survivants, de confronter des individus que parfois tout oppose (du prisonnier sans enfants au père de famille responsable, du vagabond clochard à l’adolescent peu assuré), mais qui sont amenés par de tragiques circonstances à cohabiter, à survivre, entre eux. Le danger, ou l’ivresse, c’est selon, dans The Walking Dead, ne vient pas des zombies, mais des humains, ne provient pas des marcheurs, mais des parleurs. Révolution copernicienne : les zombies ne sont qu’un prétexte. Ce qui compte, ce ne sont pas ses zombies apathiques dont la force ne provient que du nombre ; ce sont les relations entre chaque personnage, c’est l’ambiance « survie en terrain hostile », c’est surtout l’incroyable pathos qui se dégage des scènes, qui se forge et qui se développe avec la montée des périls et l’amoncellement des disparitions.

screenscreenscreen

screenDans Jurassic Park, le joueur était forcé de diriger tour à tour de nombreux personnages, ce qui empêchait toute identification profonde avec un personnage précis. Là encore, les erreurs ont été corrigées : dans The Walking Dead, l’on incarne un unique personnage, Lee Everett, au passé trouble, mais homme au grand cœur, perfectible par instants, mais d’une résolution inébranlable. On croisera une bonne dizaine de survivants. Cependant dans l’immense majorité il ne s’agira que de rôdeurs, de passants. L’unique point de repère, qui suit le joueur du début à la fin, est une petite fille de huit (puis neuf) ans, Clementine. Sans elle, toute la face du jeu en aurait été changée.

C’est le couple Lee-Clementine qui rend The Walking Dead culte. Dans ce monde apocalyptique, où tout ce qui est humain est devenu étranger, Clementine est l’unique point de ralliement de Lee (c’est-à-dire du joueur, tant l’immersion est complète), le moyen en même temps que la fin de toute action. Dans ce monde apocalyptique, où le danger vient parfois plus des humains que des zombies, c’est la relation Lee-Clementine qui sert de porte-étendard à tout ce qui fait l’humanité du genre humain. Il y a des couples marquants dans le monde du jeu vidéo : Ico et Yorda, Wanda et Agro, Jade et Pey’J… et désormais Lee et Clementine.

screenSi The Walking Dead avait été simplement un film, qu’en aurait-il été ? Ceux qui ont fait l’expérience de découvrir le jeu sur YouTube ont sans doute été eus. Deux éléments cruciaux d’immersion leur échappent, parce que The Walking Dead n’est pas non plus un film. D’abord, le gameplay. Contre toute attente, loin d’être un pis-aller, une souffrance à accepter pour assister à une intrigue passionnante, les QTE sont savamment dosés ; jamais lourds, jamais fastidieux, ils renforcent tout souplement l’immersion en un équilibre parfait. Ensuite, les choix. Ceux-ci seront bien souvent à effectuer en un temps minimum. Surtout, d’épisode en épisode, ils auront une conséquence sur la trame. On ne modèle pas le cœur du jeu avec nos choix, mais on en change les bordures. Non pas jusqu’à influencer les grandes lignes du scénario, mais à en modifier les contours, principalement pour changer vos relations avec les autres survivants – si jamais vos choix les auront fait survivre.

screenscreenscreen

screenPendant la douzaine d’heures des cinq épisodes (durée appréciable pour un jeu d’aventures, mais peu importe, encore une fois, la taille du flacon), on traverse un panel incroyable de situations, d’impressions, d’émotions. Le résultat final est encore servi par une bande sonore de haut vol : les musiques sont à la fois efficaces et mémorables ; les voix (anglaises) sont toujours dans le bon ton, et constituent là encore une performance que l’on retiendra. Mention spéciale, évidemment, à Clementine. Quant au moteur graphique, Telltale a su faire oublier son retard intrinsèque en prenant le – pratique – parti-pris de reprendre la charte graphique du Comics, ce qui offre au final des graphismes en cell-shading au résultat inespéré au vu du moteur initial.

Si pour vous un jeu vidéo se doit de proposer avant tout un gameplay technique, exigeant, profond, alors The Walking Dead constitue le niveau zéro du jeu vidéo. Si au contraire, vous ne recherchez qu’à vivre de beaux, de grands moments, si vous pensez que le média (jeu, livre ou film) ne doit être qu’un prétexte au divertissement, à la sensation, si, pour résumer, vous êtes quelqu’un de raisonnable (et qui parle anglais, à moins de compter sur les traductions non-officielles, disponibles sur PC seulement), alors The Walking Dead ne pourra que vous plaire. The Walking Dead est un grand jeu, car il remplit à merveille une exigence : proposer une expérience marquante.

screenPour qu’il soit un très grand jeu, un immense jeu, il aurait fallu qu’il sache proposer une intrigue passionnante tout en s’appuyant sur un gameplay qui soit digne du scénario sans le desservir. Peu de titres sont arrivés à atteindre l’une de ces deux exigences : The Walking Dead, par son scénario, fait partie de ce cercle fermé. Mais plus rares encore sont ceux qui ont su conjuguer gameplay et scénario cultes, et, à ce titre, The Walking Dead, qui ne peut faire autrement que sacrifier le premier sur l’autel du second, n’y parvient pas : aussi, on ne lui attribuera pas la note suprême.

Le symptôme d’un grand jeu est qu’il parvient à attirer au-delà du public visé, qu’il sait convaincre néophytes comme experts du jeu d’aventure. Telltale a su dépasser les clivages entre casuals et gamers, pour offrir ce que certains appellent déjà une nouvelle génération du jeu vidéo : non pas celui qui cherche à surprendre, à émouvoir, par sa technique, par son gameplay, par ses graphismes ; mais celui qui cherche d’abord à raconter une histoire, et en subordonnant tout le reste à cette exigence fabulatrice. C’est peut-être cela, la maturité. Pionnier d’un genre nouveau ? Héritier de jeux à la narration enchanteresse ? Ne nous préoccupons pas de cela. The Walking Dead est un indispensable. Une histoire mémorable plus qu’un jeu. Et alors ?


imageLe contre-avis de Cedric

imagePas de doute, tout en proposant une aventure originale, et donc en ne succombant pas aux sirènes de l'adaptation, The Walking Dead de Telltale Game est extrêmement fidèle à l'ambiance de l'oeuvre originale.
Des personnages forts. Des situations désespérées. Des choix sans concession...
Plus qu'un simple jeu, il s'agit d'une véritable plongée en enfer, où chaque parole, chaque décision aura son importance et une incidence sur le jeu. Et on a beau rapidement se dire de ne pas s'attacher trop à ses compagnons, parce que l'histoire n'est pas tendre avec eux et rien ne leur sera épargné, pris dans l'aventure, on ne peut réussir à tisser des liens qui se brisent avec d'autant plus de violence que la situation est horrible.
Si malgré tout, certains passages sont très convenus - pour qui connait la série d'origine -, et que, du coup, certains épisode pourront vous sembler moins percutants que d'autres, il n'empêch que The Walking Dead est un très bon jeu. Ou plutôt un très bon film interactif.
Malgré des limitations - capacités ? - techniques évidentes, liées notamment à un moteur graphique vieillissant et une jouabilité moyenne qui limite grandement la liberté d'action, le jeu assure très largement ce qu'il faut.
Une fois le premier épisode commencé, on ne pourra s'empêcher d'aller au bout et d'être pris aux tripes.
Bref, une excellente surprise.
 

 

 
image

 

 

 

 

Test précédent - Home - Test suivant

 

The Walking Dead (PC, Xbox 360, PS3, iPad, iPhone)

Plateformes : PC

Editeur : Telltale Games

Développeur : Telltale Games

PEGI : 18+

Prix : 24,99 €

Aller sur le site officiel

LA NOTE

LA NOTE DES LECTEURS

note 9/10

 

 

Images du jeu The Walking Dead (PC, Xbox 360, PS3, iPad, iPhone) :

Derniers Commentaires

0