Publié le Mercredi 2 février 2022 à 12:00:00 par Ambre Cogné
Expeditions : Rome (PC)
Ils sont pas fous fous ces romains…
Expeditions : Rome est un jeu avec des sandales et des jupettes et, ça tombe bien, tout le monde aime les jupettes à Gamalive. Pour mon premier test au sein du site, j'ai été mandatée pour m'occuper du jeu, donc. Voici mon expérience avec des légats et soldats romains...Directement, une introduction nous explique que mon personnage a été envoyé sur un front lointain pour le protéger des dangers de la cour romaine. Un prologue qui manque peut-être un peu de contexte, puisque de nombreux noms et postes historiques sont mentionnés sans définition. Je me rends compte que je n’aurais peut-être pas dû sécher mes cours de latin…
Après un fondu au noir, je me retrouve devant une création de personnage simple mais efficace, et premier rire : décidant de jouer un personnage féminin, le jeu ne me permet pas de choisir un prénom ! Choix qui pourrait choquer, mais je suis consciente de l'importance de la fidélité historique. Les développeurs de Logic Artists ont fait leur travail de recherche, c’est certain. Tant pis, donc, ma "légat" ne pourra pas s'appeler Kimberley...
Aussitôt après avoir fini mon personnage, le jeu me demande de choisir entre trois approches sociales, Ethos (la hiérarchie et la force), Logos (la logique et la raison) et Pathos (la manipulation émotionnelle), qui « auront des répercussions sur le reste du jeu ». Mmh…d’accord, j’aurais peut-être apprécié un peu de contexte ici aussi. J’apprendrais vite plus tard qu’il s’agit de choix de dialogues spéciaux réservés à une des trois philosophies. Mes élans de grosse bourrine me poussent vers l’Ethos, que je prends donc.
Enfin, quatre niveaux de difficulté me sont proposés : facile, normal, difficile et « fou ». Le jeu présélectionne le mode normal. Voulant jouer au jeu tel que les développeurs le suggèrent, je choisis cette difficulté, sans savoir que je m’en mordrais très vite les doigts.
Le jeu se lance enfin réellement ! Je me trouve donc sur un bateau en direction d’une guerre lointaine contre des pirates. Quelques discussions me permettent de découvrir des dialogues bien écrits, des personnages intriguant et des doublages vraiment très corrects. Jusque-là, pas de grandeur, de « Wouah ! » éblouissants, mais à la place une suite de petites réussites, de petits détails positifs qui me donnent envie d’en savoir plus sur ce jeu qui me promet déjà beaucoup. Le genre de mon personnage est déjà source de préjudice et de remarques parfois désobligeantes typiques de la culture de l’époque, que j’accueille alors à bras ouverts, choisissant de répondre avec un sarcasme tranchant.
Enfin, courte cinématique faisant bien ramer mon ordinateur (j’y reviendrai plus tard), et petit combat tutoriel contre des pirates !
Contrairement à beaucoup d’autres jeux de stratégie similaires, le tutoriel me laisse choisir quoi faire de mes unités et ne me déverse pas des pages et des pages d’explication en un bloc. A la place, le jeu prend la même approche qu’un maître du jeu apprenant un nouveau système de jeu de rôle à un joueur : on explique ce qui est important au moment où la mécanique est utilisée. C’est pour le moins agréable et rafraîchissant !
Le système de combat est ici une sorte de mélange entre XCOM et Donjons et Dragons Edition 5 : en tour-par-tour sur un plateau hexagonal, je contrôle 5 personnages ayant chacun leurs capacités spéciales et leur équipement. Durant mon tour, je peux passer d’un personnage à l’autre, bouger chacun d’un nombre de cases dépendant de sa vitesse et de son armure et utiliser un point d’action pour attaquer (les attaques touchent systématiquement !) ou utiliser une compétence, et ensuite vient le tour de l’IA. C’est plutôt sympa, mais un seul de mes personnages dispose d’une attaque à distance et plusieurs fois je me retrouve incapable de consommer un ou plusieurs points d’action par manque de place autour des adversaires.
Je m’amuse pendant quelques minutes, mais je suis tout de même plutôt heureuse de retourner aux dialogues à choix multiples. J’essaie de jouer un personnage qui ne se laisse pas faire mais qui ne veut pas de violence inutile malgré tout et jusque-là le jeu me le permet plutôt bien.
Nous arrivons à un campement romain et je dois parler au chef, qui m’informe alors que moi et l’équipe rencontrée sur le bateau seront affectées à une sorte d’unité spéciale façon « Black Ops ». J’imagine que sans les conventions de Genève, il n’y a pas de crimes de guerre, hein ?
Le chef m’envoie chercher mon équipement, ce qui me propose une classe, entre quatre : tank, épéiste, archer ou lancier. Ayant eu goût au système de « Focus » de l’épéiste déjà présent dans le groupe, je choisis donc cette classe, j’échange ma toge pour une armure légère et je m’arme d’une dague en plus de mon glaive. Stylé !
Notre première mission nous envoie détruire la flotte pirate. Nous quittons donc le campement pour prendre rendez-vous avec le cinquième membre de notre équipe, que nous n’avons pas encore rencontré. C’est en pleine nuit qu’il, ou plutôt elle, s’approche de nous. Sans le savoir, je viens de mettre un pied dans le tombeau du fun.
Fun qui est mort à petit feu…
Le premier « vrai » combat du jeu sonne à notre porte, et les soucis commencent.
Un énorme problème vient noircir mon expérience à la toute première mission du jeu : les combats sont non seulement très difficiles, mais aussi extrêmement lents à cause d’une liste longue comme le bras de choix de conception et d’équilibrage douteux.
Le joueur est systématiquement en infériorité numérique, avec jusque-là aucun contre-exemple. Au minimum, je me suis retrouvée à cinq contre sept, mais un des combats de la seconde mission est à cinq contre une quinzaine. Les tours de l’IA peuvent donc prendre une à deux minutes à être résolus, une à deux minutes pendant lesquelles on ne peut rien faire. Même les « pions », des ennemis supposés être tuables en masse et qui remboursent l’action utilisée pour les tuer, peuvent prendre 3 à 4 coups avant de mourir, tandis que tous les autres ennemis ont autant de PVs que nos personnages.
Les armes sont également à blâmer. Au pire on a l’impression de frapper les ennemis avec une frite en mousse comme à la piscine, au mieux on a l’impression de faire les dégâts minimaux d’une véritable arme. La fourchette de dégâts des armes est souvent du simple au double, et essentiellement jamais suffisante pour tuer un pion en un seul coup. A ces armes déjà faiblardes, le jeu ajoute un système d’armure qui change les dégâts déjà anorexiques en un seul point au moins une fois sur 10, même sur un coup critique. Bien sûr, les ennemis que j’ai rencontrés avaient au mieux autant d’armure que mes personnages, au pire plus.
Le jeu possède une mécanique d’encerclement et d’attaques d’opportunité qui, à cause du surnombre, sont un atout de plus dans la manche de l’IA. Les adversaires contrôlent une surface gigantesque sur le plateau, à travers de laquelle il est impossible de se déplacer sans être blessé et donc de manœuvrer dans une position favorable, tandis que des ennemis apparaissent régulièrement dans le dos de nos unités. Contrairement à d’autres systèmes de combat ayant des attaques d’opportunité (comme tout simplement Donjons & Dragons), tuer l’adversaire contrôlant la zone est l’unique option pour pouvoir s’éloigner sans prendre une attaque gratuite. Un système de « pas » permettant de se déplacer d’un unique hexagone au prix de la totalité de notre mouvement ou de désengagement au prix de notre action aurait été le bienvenu.
En parlant de Donjons & Dragons, permettez-moi de mentionner les unités lourdes, ayant le rôle de « tank », mais qui ne réussissent qu’à être des gros plots avec beaucoup de PVs. Incapables d’attirer les attaques vers eux, l’IA choisit donc systématiquement les cibles les plus faibles en priorité. Ajoutez à ça le fait que seul l’archer peut attaquer à distance (sans utiliser le pilum, une arme limitée à trois utilisations par expédition, que l’on gagne uniquement au cinquième combat) et que le lancier ne peut pas utiliser son arme d’hast à travers un allié, on se retrouve obligé d’exposer nos unités aux coups des adversaires.
Enfin, le moral. En voyant des plateaux constamment remplis de faibles unités ayant une statistique de moral, je me disais qu’une partie de celles-ci paniqueraient ou fuiraient régulièrement, non ? Non. Ici encore, c’est raté : je n’ai vu qu’une seule unité adverse paniquer dans les cinq combats que j’ai menés, après avoir massacré cinq de ses six compagnons. Cependant, à l’instant où un de vos personnages tombe à zéro PVs, au moins un autre panique et s’enfuit, réduisant le nombre de vos unités de 5 (déjà en sous-nombre sévère) à 3, rendant le combat absolument ingagnable, et surtout ingagnable dans les trois tours donnés avant la mort du personnage tombé à terre. Oh, et aurais-je oublié de préciser que la mort des compagnons est définitive ? L’option peut être désactivée, certes, mais il s’agit tout de même d’un cocktail douteux. Certaines capacités réduisant le moral des ennemis existent mais même à -25 de moral, un ennemi ne paniquera pas. Génial.
En somme, c’est un peu XCOM en moins bien.
Ce qui me blesse le plus, ce sont les similarités avec XCOM. J’ai près de 170 heures sur le deuxième opus, et je l’ai fini au moins trois fois, à la fois sur le jeu de base et avec le DLC War of The Chosen, avec et sans mods.
Mais XCOM2 ne souffre d’aucun des problèmes listés précédemment. Le joueur est souvent en infériorité numérique, oui, mais les fusillades sont généralement plutôt contre une poignée d’ennemis. Ces ennemis tombent en un ou deux coups pour la plupart, et les tours de l’IA sont souvent interrompus par les attaques de surveillance des unités du joueur, ce qui donne l’impression de faire quelque chose même lors du tour de l’adversaire.
Dans l’extension War of The Chosen, le jeu ajoute une nouvelle faction, les « Lost », des zombies qui attaquent en horde. Comme les pions d’Expeditions : Rome, tuer un Lost rembourse un point d’action. Mais les Losts d’XCOM possèdent généralement 3 points de vie et meurent donc généralement en un seul coup. De plus, les Losts ne bougent pas individuellement lors de leur tour, mais tous en même temps et de manière expéditive, là où les pions d’Expeditions résolvent leur tour un à un, dans une lenteur mortelle. Réussir à organiser un tour efficacement pour tuer six ou huit Losts est une des expériences les plus satisfaisantes du jeu, là où les pions d’Expedition : Rome se ressentent comme une corvée.
Les armes d’XCOM ont une fourchette de dégâts de deux à trois points, de 5 à 7 pour les armes de départ, contre des ennemis ayant généralement 4 ou 6 points de vie. Alors que dans Expedition : Rome, il est impossible de prévoir si un ennemi sera mort ce tour-ci ou dans deux tours, XCOM permet de bien mieux prévoir les situations futures par un aléatoire beaucoup plus maîtrisé (et ce même avec les fameux tirs ratés à 99% !!!).
Là où les mécaniques d’encerclement et d’attaques d’opportunité d’Expedition : Rome force unanimement des combats avec peu de mouvements, les attaques de flanc et la surveillance d’XCOM existent en équilibre, l’une invitant à bouger pour se mettre dans une meilleure position pendant que l’autre force à bien penser ses déplacements et l’enchaînement des tours (une attaque annulant la surveillance de la cible touchée).
Surtout, les similarités me blessent parce que jamais le combat d’XCOM ne m’a dégoûté du jeu au point où je ne comptais plus jamais y toucher, même lorsque, comme la plupart des joueurs et joueuses d’XCOM, trois attaques à 99% ratent à la suite. Je n’attendais rien d’Expeditions : Rome, et pourtant les promesses de ses dialogues et ses personnages ont été gâchées par des combats exaspérants, répétitifs et longs.
A 44,99 €, j’aurais espéré un jeu mieux dosé. Espérons que les mises à jour corrigeront ce problème et, dans ce cas, le jeu aura alors une autre dimension et un intérêt certain.
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