Publié le Dimanche 17 février 2013 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du Dimanche

You believe encore au Père Noël ?

La vie n’est pas un film hollywoodien. Il faut arrêter de croire que les gentils gagnent toujours à la fin, et que les méchants finissent punis de leurs crimes ignobles.

Dans la vraie vie, le flic n’est pas un super héros qui sauve le monde d’un complot terroriste russe avec son fils qui est en fait un agent secret, mais il ouvre le feu complètement bourré sur une bande de jeunes un peu agités ou rackette les brigands avec son unité anti-criminalité.

Dans la vraie vie, les mafieux ne sont pas de gentils dépressifs avec un sens de l’honneur irréprochable. Ils expliquent qu’ils flingueront le premier gamin qui mettra les pieds dans l’école construite sur un terrain qui leur a été saisi par la justice.

Dans la vraie vie, le fougueux cheval blanc ne fait pas ami-ami avec un petit garçon dans la Camargue. Il termine entre deux tranches de pâte, mélangé à de la sauce tomate, en Roumanie.

Dans la vraie vie, le prof qui découvre son homosexualité la veille de son mariage ne termine pas en dansant avec son nouveau copain journaliste qui ressemble étrangement à Magnum mais sans la moustache. Il finit jeté à la rue par ses parents, raillé par ses amis et meurt dans le caniveau roué de coups par des connards appartenant au groupuscule intégriste Civitas.

Dans la vraie vie, après nous avoir chanté avec brio un excellent tube dans lequel on explique, justement, que les contes de fées n’existent pas, que le prince charmant a foutu le camp emportant loin de Cendrillon ses enfants, on finit dans une émission karaoké pour avoir de quoi manger à la fin du mois.

Dans la vraie vie, j’ai beau essayer de faire venir à moi la bouteille de Ricard par lévitation, elle reste immobile dans le placard. Bon, par contre, c’est vrai, j’ai progressé en « influencer les esprits faibles ». Tiens, rien qu’hier soir, j’étais peinard, avachi dans mon bain, à barboter dans la mousse un bon bouquin entre les mains, mes filles ont accepté de faire des allers-retours dans la cuisine pour venir me donner un petit morceau de sifflard, un toast, un petit feuilleté au chorizo…
Vous me direz, c’est facile. Ce sont des filles. Donc question esprit faible, c’est aisé à manipuler. Seulement ça n’a pas marché sur ma femme. J’ai eu beau lui susurrer mentalement de venir m’apporter un whisky, j’ai eu le droit à « t’es gentil, tu sors ton gros cul de la baignoire et tu viens m’aider à m’occuper des gamines, là y’a la petite qui essaie de crever l’œil de sa sœur avec une fourchette parce qu’elle lui a dit qu’elle était moche ». J’ai ravalé la fierté de savoir que ma fille cadette avait des réactions saines et radicales comme son papa, et je suis sorti du bain pour régler le problème via une distribution de mandales. Mais le pire, dans tout ça, c’est que j’ai dû me servir mon whisky tout seul.

La vie est une pute.

Faudra quand même que je réessaie le coup de l’influence des esprits faibles. Tiens, je me servirai de mon amie Stéphanie comme cobaye. Je vous ai déjà parlé d’elle ? Une grande blonde pulpeuse et aux formes généreuses. Y’a un truc à faire, moi je dis. Par contre, vu son caractère, j’ai comme l’idée que c’est moi qui finirait avec une fourchette plantée dans l’œil. J’dis ça, j’dis rien.

Enfin bref, il faudrait peut-être arrêter de croire que tout va finir par s’arranger, que les gentils vont gagner. Que tout se passera bien parce que sinon, ce serait immoral. Injuste. Méchant. Anormal. Inconcevable.
Il faut concevoir l’inconcevable. Parce que dans la vraie vie, ce sont plus souvent les méchants qui gagnent à la fin que les gentils. Les gentils se font empapaouter sévère. Et à sec.
Dans la vie, c’est vrai que c’est mignon, c’est gentil tout plein, on a envie de le serrer dans ses bras – enfin certains ont envie, pas moi – et de lui faire des papouilles, au caniche. Mais de nos jours, mieux vaut être pitbull que caniche, croyez-moi. Parce qu’il faut se battre pour tout. Pour ses droits. Pour son respect. Pour la justice. Pour la vérité. Pour l’amour. Pour le bonheur.

Arrêtez de courber l’échine. Arrêtez de prendre des coups sans les rendre. Nous sommes en guerre. Remuez-vous. Gueulez un bon coup. Frappez vos enfants. Tirez sur votre femme et dites que vous l’avez prise pour un voleur. Sortez dans la rue. Agressez des petits vieux. Baffez des enfants. Et mangez du cheval. C’est bon le cheval. Pas la peine de le transformer en mixture à la tomate pour cacher le goût. Arrêtez d’ailleurs d’acheter des plats préparés faits avec de la merde, des morceaux de viande que même l’industrie de pâtée pour chien ne voulait pas il y a encore dix ans. Arrêtez d’être des pigeons ou des moutons.

Soyez acteurs.

Comme ça, vous aussi vous pourrez transformer votre vie en film hollywoodien.


C’était la lettre d’encouragement d’Oncle Cedric.
Tiens, d’ailleurs, en parlant d’Oncle, je souhaite un bon anniversaire – trois jours à la bourre mais le cœur y est – au mien.

Allez, je vous laisse. Ce midi, c’est raclette. Faut que j’aille découper le jambon et j’ai comme l’idée que le cochon ne va pas me laisser faire.

(toi aussi, retrouve les titres des films cités au début du texte)