La série des Zelda a ce charme désuet des univers chatoyants et enfantins, peuplés de monstres qu’un héros mononeuronal va combattre pour sauver une princesse insupportable, mais princesse quand même alors il faut bien que quelqu’un fasse le boulot.
En 25 ans d’existence, la série a toujours suivi le même chemin, proposé la même ambiance, grosso modo le même type d’univers et surtout le même type d’histoire, à des fans toujours plus nombreux et toujours plus avides d’entrer dans la peau de Link, héros désormais légendaire, devenu aujourd’hui l’une des plus grandes icones du jeu vidéo. Icône gay, certes, mais icône quand même.
Comme dans beaucoup de RPG orientaux, on se retrouve avec des personnages lisses, sans aspérité, sans âme quelque part également, qui évoluent dans un monde tout noir et tout blanc, sans nuance de gris aucune, et évoluent avec leur capacité de réflexion proche de l’huître, via une histoire vue, revue et bue jusqu’à plus soif.
Bref. Zelda, Link et les autres me sont de plus en plus insupportables. Autant dire que ça partait mal, avec un tel a priori, pour le nouvel opus made in Nintendo, The Legend of Zelda : Skyward Sword. D’autant plus que, comme d’habitude, nous allons suivre un scénario bateau, aussi original qu’un roman de Stéphanie Meyer et J.K Rowling réunies, autrement dit avec la profondeur d’un album de Oui-Oui et la portée métaphysique d’une course de bulots.
Jugez par vous-mêmes : Link est réveillé par un cauchemar aaaaaffreux affreux affreux. Heureusement pour lui, lorsqu’il ouvre les yeux, il n’assiste pas (encore) à la fin du monde mais est dans sa petite cellule de l’Ecole des Chevaliers de Celesbourg, prêt à participer à la 25ème édition de la Chevauchée Céleste. C’est une simple course à dos de gros piaf rougeâtre. Avant cela, vous aurez le temps de rencontrer la princesse Zelda, dont le design la fait cette fois-ci ressembler à une cruche, avec les anses (rapport aux oreilles décollées). Petite nouveauté, toutefois, elle fait gentiment du rentre-dedans à notre héros, limite à lui proposer la botte dans le fourré d’à-côté, oubliant que, de toute manière, c’est peine perdue, Link préfère les hommes, les durs, les tatoués, ceux qui le maltraitent. Bref, leur histoire ne mènera à rien et elle n’aura d’autre choix que de se jeter dans le vide pour en finir.
Heureusement, avant d’être totalement désespérée et de se faire Hara-Kiri avec ses oreilles, Zelda se fait enlever. Du coup, l’aventure est lancée. Link part à sa recherche et va, au passage, affronter des dangers inimaginables, et sauver le monde, voire l’univers, avec sa petite épée.
Un début toujours aussi mièvre, avec des personnages caricaturaux à la limite du ridicule, que vous allez rencontrer le temps de faire le tour de Celesbourg, cité flottante parmi les nuages.
Comme j’expliquais, on se retrouve une nouvelle fois avec une histoire calquée sur les précédents volets. Le fond ne change pas et reste toujours aussi nunuche. Heureusement, la forme, elle, a évolué. Et avant que vous ne cliquiez sur « envoyer » de l’e-mail d’insultes que vous m’avez préparé, soyez rassurés, fans de nain vert avec un bonnet à pompon. Autant l’ambiance niaise du jeu m’a exaspéré, autant il est suffisamment bien foutu, bien rythmé, bien réalisé, pour une nouvelle fois vous captiver et vous plonger dans une aventure épique et de grande classe.
Le monde se divise en plusieurs zones. Au menu, plusieurs îles flottantes, sans crème anglaise mais entourées de nuages, et quelques zones sur la terre ferme. Vous vous y rendrez à dos de Celestrier, ce gros piaf rouge au design improbable. Pour autant, ces voyages n’ont rien à voir avec ceux de l’épisode Wind Waker, par exemple. Il s’agit là ni plus ni moins qu’un vol simple, à diriger sans encombre votre monture. Pas déplaisant, mais à l’intérêt limité, avouons-le.
Notez que le début du jeu est assez poussif. Beaucoup de blabla, beaucoup de redite, et deux premières zones assez mal fichues, proposent une aventure qui, au premier abord, peut paraître assez moyennement réalisée. Il faudra vous faire violence quelques heures pour vous rendre compte que, peu à peu, The Legend of Zelda : Skyward Sword vous a entraîné dans une vraie aventure, passionnante et bien foutue.
Vous allez donc parcourir de vastes étendues remplies d’ennemis, et tenter de les défaire un à un. Quelques temples sont également au rendez-vous, avec leur lot d’énigmes simplistes mais toujours sympathiques.
L’occasion, donc, de vous parler des combats. Link tient son épée de la main droite… une nouveauté pour s’adapter, au final, au plus grand nombre… même si on ne comprend pas pourquoi aucune option ne vient permettre aux gauchers de jouer avec leur main directrice.
Le Wii MotionPlus permet de suivre vos mouvements parfaitement et de les recréer à l’écran. Un mal pour un bien, en fait. Un mal parce que certains mouvements viennent polluer vos gestes : se remettre en position d’attente peut être interprété comme un coup et frapper en un geste qui donnera un avantage à l’ennemi et vous fera perdre un peu de vie. De la même manière, tenir la Wiimote droit devant soit fait porter Link son épée à la verticale, tout en courant : une posture complètement ridicule…
Pour autant, ces gestes malheureux restent plutôt rares (surtout que l’on a tôt fait de faire attention) et la reconnaissance du Wii MotionPlus est excellente. On se sert donc d’une épée, à frapper de gauche à droite et de droite à gauche, l’angle étant pris en compte par la Wiimote. On peut aussi frapper d’estoc ou réaliser des attaques spéciales tournoyantes. Quant au Nunchuck permet de brandir un bouclier.
Bien plus agréables que dans le précédent opus sur Wii, Twilight Princess, cette jouabilité est vraiment réussie et immersive.
Petite nouveauté, une jauge d’endurance fait son apparition. Elle descendra au fil des exploits physiques du héros (courir, grimper…).
Pas de quoi sauter au plafond. Et mangez des pommes (les fruits permettront de regagner de l’endurance, pratique lors des longues ascensions).
Comme compagnon de route, Link sera affublé de Fay, un esprit incarné dans son épée. Bavarde et rapidement insupportable, Fay aura tout de même son intérêt comme, par exemple indiquer les directions à suivre. Elle pourra détecter divers éléments, que vous pourrez choisir via un menu. Et cela peut même concerner, par exemple, les cœurs qui vous offrent de la vie supplémentaire. Pratique, bien foutu, ce « radar » vous sera rapidement indispensable.
Link possède plusieurs armes. Le fouet, par exemple, permettra de retourner des fleurs pour en faire des plateformes. Vous utiliserez également un lance-pierres. Ou le scarabée, sorte de boomerang envoyé dans les airs et que vous dirigerez pour aller couper des cordes, par exemple, et donc résoudre quelques énigmes en atteignant des points inaccessibles à notre héros dont les capacités physiques sont, parfois, plus proches du myopathe que de l’athlète olympien.
Sélectionnables très rapidement, ces armes pourront surtout être améliorées grâce à un forgeron situé à Celesbourg. Cette petite ville charmante, aux couleurs chatoyantes, et à l’ambiance somme toute bien sympathique sera votre point central où vous viendrez régulièrement rendre des comptes et découvrir les étapes suivantes de votre périple.
Parlons graphismes, maintenant. Si la Wii est ce qu’elle est, et que du coup, on nage dans l’aliasing et les textures baveuses sur télé HD (finalement, rien ne vaut une bonne vieille télé cathodique pour jouer à la Wii), bref, si ce n’est globalement pas très beau, The Legend of Zelda Skyward Sword réussit toutefois à proposer un monde cohérent, plutôt bien foutu, avec de vastes paysages, une ville agréable, bref, à proposer un univers sympathique dans lequel il est agréable d’évoluer. Les donjons et autres endroits clefs ont une ambiance bien rendue, et globalement, le charme réussit à opérer une nouvelle fois. Les personnages, mélange de style semi-réaliste et de loufoque, passe même plutôt bien.
On regrettera toutefois l’animation des personnages, dont celle de Link, peu naturelle et un poil marionnette pour convaincre tout à fait.
Que dire de plus ? Le jeu vous offrira une trentaine d’heures de jeu, voire une quarantaine en se tapant des quêtes annexes, très nombreuses, et pour certaines assez sympathiques.
Honnêtement, comme vous avez pu vous en rendre compte en lisant ce début de test, ce n’était pas gagné pour The Legend of Zelda Skyward Sword. Du tout. Malgré tout, le charme opère. Bon, d’accord, c’est loin – très loin – d’être le meilleur jeu de la série. Entre les graphismes vieillots de la Wii, une jouabilité perfectible, un niveau de difficulté un brin inférieur à ce que l’on avait l’habitude d’avoir dans la série, une histoire toujours aussi cruche, des personnages neuneus et un début un brin longuet et ennuyeux, The Legend of Zelda Skyward Sword est un bon jeu. Si, si. Parce que les développeurs ont repris toutes ces petites recettes qui font de la série l’une des séries phares du jeu vidéo. Parce que l’ambiance s’installe petit à petit et vous entraîne. Parce qu’on se laisse prendre par l’aventure, malgré tout. Parce que les dialogues sont plus travaillés que d’habitude. Parce que certains moments sont vraiment épiques. Parce que la musique, toujours aussi réussie, vous fait siffloter et vous immerge un peu plus dans cette étonnante odyssée. Parce que l’on se retrouve avec un mélange des genres, avec des mini-jeux, avec un brin de Wii Sports, de Wii Music, de Mario Galaxy, de Metroid Prime, tout un tas de passages qui font penser à ces jeux et à leur jouabilité, et qui ici se marient intelligemment au monde de Zelda. Parce que Nintendo a tiré pleinement partie de son Wii MotionPlus. Parce que, malgré tout, l’univers de Zelda est bien respecté.
Bref, sans être le jeu de l’année, ce The Legend of Zelda Skyward Sword s’installe comme un bon cru. On y croit encore. On s’y plait encore. Et c’est avant tout, tout ce qui compte.