En novembre dernier, Nintendo nous proposait des remakes des épisodes Diamant et Perle sur Nintendo Switch. Si vous nous suivez régulièrement, vous savez que ces remakes sont loin de m’avoir convaincu. Non pas qu’ils étaient mauvais, mais je les ai vécu comme un retour en arrière dans la licence. Un comble pour une série où l’innovation se fait déjà à pas de Bulbizarre. Que ce soit dans le design ou au travers du gameplay, tout fleurait le passé. C’était peut-être voulu. Peut-être pas, toujours est-il que personnellement, ça m’a dérangé et ça a pas mal égratigné mon plaisir de jeu. Sans compter que la finition n’était pas au rendez-vous, avec de nombreux bugs et autres soft lock, fort heureusement corrigés depuis. Il faut dire que ce n’était pas Game Freak qui était aux commandes de ces remakes. En effet, le studio à l’origine de la franchise était bien trop occupé à plancher sur ce Légendes Pokémon Arceus. Il s’agit d’un spin-off qui profite justement de son statut de spin-off pour coller un grand coup de pied dans les mécanismes habituels de la série. Pour notre plus grand plaisir ? C’est ce qu’on va voir.

Prenons le Tauros par les cornes : on va tout de suite parler de ce qui a dû vous sauter aux yeux si vous avez matté des trailers du jeu, ses graphismes. C’est moche. Surtout quand on le compare à The Legend Of Zelda Breath Of The Wild qui, sans être un foudre de guerre, donnait vachement plus le change et réussissait à nous flatter un peu la rétine, alors qu’il est sorti il y a déjà... 5 ans. Même Pokémon Epée et Bouclier, pourtant déjà pas très beaux, n’étaient pas aussi laids.

Ici, c’est le festival de clipping, la fête des textures soit passables, soit dégueulasses, le carnaval des effets de scintillements ignobles. A croire que le mec qui gère normalement les effets de lumière était en congés ou qu’ils ont pris un stagiaire. Je ne dis pas que certains paysages ne réussissent pas à être un peu dépaysants, je ne critique pas non plus la direction artistique du jeu, là je suis sur du factuel, techniquement parlant, c’est moche et c’est pauvre à en faire vomir un Grotadmorv. Évitons les faux arguments à base de « c’est moins pire en mode portable ». Dans ce cas-là, autant dire que si on ferme les yeux, ça règle encore plus le problème. C’est faire preuve de mauvaise foi et gageons franchement qu’une autre licence se ferait bien plus facilement cartonner pour avoir rendu un copie technique pareille. Fort heureusement, si les graphismes suffisaient à faire un bon jeu, ça se saurait.


Et comme on le dit souvent, il ne faut pas se fier aux apparences, car sous sa plastique franchement pas attrayante se cache le jeu Pokémon qui, s’il n’est clairement pas le jeu ultime que tout fan attend, réussit quand même à s’en approcher un peu en donnant un bon coup de pied dans la machine bien huilée mais pourtant tellement redondante de la série. Un vent de fraîcheur, comme on dit.

Légendes Pokémon Arceus nous met dans la peau d’un jeune garçon ou d’une jeune fille qui fait un saut dans le passé dans la région d’Hisui, connu plus tard sous le nom de Sinnoh. A l’époque où nous débarquons, les Pokémons et les hommes sont loin de s’apprécier et de vivre en harmonie comme nous en avons l’habitude dans la série. Ici, justement, vous allez contribuer à l’élaboration du premier Pokédex et donc à permettre ce rapprochement entre humains et monstres de poche. Si clairement, l’histoire ne pète pas trois pattes à un Psykokwak, à base de Pokémon à calmer, avec des tonnes de blabla pas forcément intéressant et une mise en scène qui est toujours aussi peu inspirée, elle a un impact direct sur le gameplay du jeu.

Forcément, les Pokémon n’étant pas encore les meilleurs amis des humains, peu de personnes les approchent et encore moins en possèdent. Du coup, ne vous attendez pas à aller récupérer des badges en défiant des champions d’arène ou à vous faire défier tous les 5 mètres par le premier maître improvisé. Dans Légendes Pokémon Arceus, les combats entre dresseurs sont très en retrait et ce n’est pas forcément un mal. D’autant que l’histoire justifie parfaitement ce choix.

Non, Légendes Pokémon Arceus est un peu le Breath Of The Wild des jeux Pokémon.

S’il ne s’agit pas d’un open-world au sens strict du terme, avec une map totalement ouverte, le jeu s’articule autour d’une ville HUB, Rusti-Cité, entourée de plusieurs zones relativement vastes, correspondant à différents biomes, qui vous serviront de terrain de jeu aussi bien pour capturer des Pokémon que pour récupérer de multiples matériaux vous permettant de confectionner des Pokéball et autres objets plus ou moins utiles.

La capture et l’exploration sont vraiment au cœur de ce spin-off qui a revu la manière de capturer les Pokémon. Oui, Let's Go l'avait déjà fait avec plus ou moins de succès, mais c'était plus pour capitaliser sur l'application mobile Pokémon Let's Go que pour renouveller la série. Ici, Game Freak a vraiment voulu modifier la formule d'origine pour la rendre bien plus fluide et naturelle. Désormais, lorsqu'on voit un Pokémon se balader dans la nature, il n’est plus forcément nécessaire d’entrer en confrontation avec lui pour le capturer, puisque les Pokéball peuvent être lancées hors combat. On essaie donc le plus possible de prendre les Pokémon par surprise en restant caché dans les hautes herbes, en utilisant un item pour masquer nos bruits de pas ou en leur envoyant un appât pour les occuper. Pour certains Pokémon, ce sera plus difficile que d’autres et dès qu’ils vous repèreront, ils chercheront à vous attaquer. On arrive à une autre grosse nouveauté de ce volet, la possibilité que les Pokémon sauvages attaquent directement le joueur et le mettent KO. Si tel est le cas, vous perdrez une partie de votre équipement.

Du coup, deux choix s’offrent à vous : fuir pour retenter votre chance en étant plus discret ou les affronter avec vos Pokémons de manière plus traditionnelle. On tente donc l’approche discrète et si ça se solde par un échec, on revient aux fondamentaux. La chose vraiment appréciable est que le passage en mode combat se fait vraiment rapidement, pratiquement sans transition, pour ne pas casser le côté exploration. On a d'ailleurs maintenant la possibilité de déplacer notre personnage pendant les combats, que ce soit pour mieux voir le combat ou simplement pour fuir comme un pleutre en laissant notre Pokémon sur le terrain. J’ai vraiment trouvé que cette nouvelle manière de jouer rendait l’expérience de capture beaucoup plus fluide et agréable.

D'ailleurs, comme on parle des combats, il faut savoir qu'ils ont également eu droit à un petit coup de neuf.

A commencer par  l'apparition d'une barre d'action qui vous indique qui attaque et quand, à la manière de Final Fantasy X. Vous risquez de me demander pourquoi avoir mis ça en place puisque Pokémon a toujours été en mode un tour conduit à une action. Eh bien parce que ça c'était avant. Oui car maintenant il est possible d'attaquer deux fois d'affilée. Et ça c'est en partie lié à l'arrivée des styles de combat qu'on peut utiliser lorsqu'un Pokémon maîtrise une attaque. Kézako ? Maintenant, outre l'attaque en mode normal, on pourra lancer cette attaque dans le style rapide ou puissant. Le premier réduit la puissance de l'attaque d'origine mais permet de potentiellement pouvoir attaquer une seconde fois, le second augmente la puissance de l'attaque mais augmente le risque que l'adversaire puisse attaquer 2 fois. Si clairement, c’est assez sous-exploité compte tenu du faible nombre de combats contre des dresseurs que propose le jeu, je trouve que c’est une feature bienvenue qui apporte une couche de stratégie supplémentaire. Reste à espérer que, comme le système de capture, cette feature fera un saut dans la série principale.

Pour le reste, Légendes Pokémon Arceus est un jeu à monde semi-ouvert assez classique, proposant, outre son aventure principale, une bonne centaine de quêtes annexes. Certaines sont plutôt rigolotes, d’autres sont franchement peu intéressantes mais ce qui en ressort, c'est qu'elles ne sont, dans l’ensemble, que très peu scénarisées. On trouve également des quêtes de collectibles demandant de retrouver des flammes ou des Pokémon, ainsi qu'un bon paquet de quête après avoir terminé le jeu qui nous permettent de récupérer des légendaires. Epée/Bouclier avaient leurs antre Dynamax, Légendes Pokémon Arceus a ses failles temporelles qui permettent de récupérer des items et pléthore de Pokémon spécifiques. On retrouve la présence de Pokémon Shiney, avec un taux de présence bien plus élevé que dans les jeux classiques et on note l’apparition de Pokémon Baron, version plus puissante en termes de statistique d’un Pokémon normal. Pour le reste, on peut noter la disparition de la reproduction qui montre vraiment que ce jeu Pokémon n’est pas accès sur les combats et la recherche du Moveset parfait.

La quête la plus longue de Légendes Pokémon Arceus et aussi la plus prenante étant, bien entendu, de compléter le Pokédex.

En effet, contrairement aux épisodes classiques, il ne suffit pas de capturer le Pokémon pour compléter sa page. Des tâches sont à réaliser afin de faire augmenter un indice qui, lorsqu'il atteint dix points, permet de considérer que la fiche du Pokémon est achevée. Les tâches à réaliser sont assez variées : ça va de la capture bête et méchante un certain nombre de fois à l'utilisation d'attaques ou de styles spécifiques. Pour valider vos tâches et les Pokémon capturés inscrits dans votre Pokédex papier, il faudra faire valider vos actions par le Professeur Lavande. A l'issue de cette évaluation, il vous donnera de l'argent et vous gagnerez des points qui vous permettront d'obtenir un rang de complétion du Pokédex qui s'étale jusqu'à 10 et qui permet de pouvoir contrôler des Pokémon de plus en plus puissants. Un système pour remplacer les badges, en somme.

Reste que voilà, même s'il est clair qu'il offre une expérience rafraîchissante et que c'est un bel appel à l'aventure, sans parler de ses graphismes, le jeu souffre de quelques petits problèmes.

A commencer par une faune qui manque cruellement de vie. Oui, on croise une multitude de Pokémon sauvages, mais on a plus l'impression qu'ils ont été posés là plutôt qu'ils vivent en pleine nature. Sans aller jusqu'à un Pokémon Snap qui nous proposait des tranches de vie de Pokémon, il aurait été cool de leur donner un semblant de vie : en les faisant se cacher dans des terriers, en les faisant chasser, manger, bref, en donnant un peu de vie à l'ensemble. Si ce n'est une fois où j'ai aperçu des Pokémon se détendre dans des sources chaudes ou dormir, on retrouve les Pokémon plantés bêtement là. Ce manque d'interaction est un peu dommage.

Autre truc un peu chiant et pourtant tout bête, il est dommage de devoir revenir systématiquement à Rusti-Cité pour passer d'une zone à l'autre. Certes, les temps de chargement sont rapides, mais à l'image des menus qui manquent clairement d'ergonomie, ça aurait pu être évité.

Dernière remarque, le jeu est à mon sens un peu trop facile. Les affrontements de dresseurs n'étant pratiquement plus au programme, le challenge est loin d'être compliqué à quelques situations près. Le multi expérience y est pour beaucoup puisqu'il permet vraiment de gagner de l'expérience sans se fouler. Je comprends totalement qu'ils aient souhaité faciliter la progression au profit de l'exploration. Mais du coup, ben ça manque quand même un peu de challenge.
 

Qu'on ne s'y trompe pas : oui, Légendes Pokémon Arceus est moche. Oui, je peux dire qu'il a pas mal de défauts. Pour autant, c'est un épisode que j'ai trouvé franchement sympathique. Il offre, sans aucun doute, le vent de fraîcheur dont la série avait besoin et ça fait un bien fou. Personnellement, j'y ai retrouvé cet appel à l'aventure, à l'exploration qui m'avait tant plu lorsque j'ai découvert le monde des Pokémon avec les versions Rouge et Bleu. J'ai pris un véritable plaisir à parcourir ces étendus, même moches, pour aller choper du Pokémon et découvrir quelques secrets. Cette nouvelle manière de capturer est vraiment chouette, immersive. Tout comme les nouveautés du système de combat qui apportent une couche supplémentaire de stratégie. Mais à côté, Légendes Pokémon Arceus est également un jeu qui aurait mérité d’avoir un peu plus d’ambition : techniquement déjà, ça c’est une certitude, mais aussi au niveau de sa faune qui aurait franchement pu être plus crédible. Dans tous les cas, ça reste un jeu très sympathique à parcourir pour tous ceux qui souhaitent partir à l’aventure, bien conscient que dans ce volet, les combats sont mis de côté. Personnellement, je suis très curieux de voir quels mécanismes issus de ce volet resteront pour la série principale, mais ça amorce vraiment du bon.

Et si vous souhaitez retrouver la version vidéo de ce test, avec des morceaux de clipping, de scintillement, mais aussi beaucoup de Pokémon, c'est par ici que ça se passe :
 

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