Publié le Vendredi 12 juin 2020 à 09:01:00 par Cedric Gasperini
Test de The Last of Us Part II (PS4)
STRICTEMENT INTERDIT AUX MOINS DE 18 ANS
On va commencer, une fois n’est pas coutume, par un avertissement. The Last of Us Part II n’est pas un jeu pour votre ado. S’il y en a vraiment un qui mérite son PEGI 18 et que l’on doit impérativement interdire aux moins de 18 ans, c’est bien celui-là.Il faut vraiment, vraiment, être un malade pour laisser son gosse jouer à The Last of Us Part II. Si vous connaissez quelqu’un autour de vous qui le fait, prévenez les services sociaux.
Car The Last of Us Part II est un jeu d’une violence inouïe. Du jamais vu. Une cruauté et une explosion de haine totalement incroyable. Parfois jusqu’à la nausée. Vous plongeant souvent dans un état de malaise insoutenable. Mais une violence qui n’est jamais gratuite et qui porte un vrai message. Car The Last of Us Part II, avec cette insoutenable noirceur et cette violence dérangeante qui le suivent tout au long du jeu, sert un propos important, un propos profond, un propos philosophique. La violence engendre la violence. C’est simple, basique, certes, mais c’est montré d’une manière brute, brutale, frontale comme on n’en a jamais vu dans un jeu vidéo et comme rarement on a pu le voir dans un film. C’est dire.
Et ce message passera largement au-dessus de la tête des enfants qui n’y verront qu’une violence jubilatoire qu’ils ne comprendront pas et ne pourront pas assimiler.
Oui, évitez même si votre enfant est « très mâture pour son âge ». Ce qui est dans 99% des cas synonyme de « Tant qu’il ne viole pas des chats, je me fous de savoir ce qu’il fait, de toute manière, la vie de mon gamin, je m’en branle ».
Bref. Il était important, à mon sens, de faire cette introduction sur l’extrême violence du titre. Que d’ailleurs certains adultes ne comprendront pas forcément non plus et prendront au premier degré. Alors que le message est bien plus profond.
Oui, The Last of Us Part II est un jeu ultra-violent, parfois à la limite de ce que l’on peut supporter. Mais ce n’en est pas moins un chef d’œuvre. Un putain de chef d’œuvre. Un jeu comme vous n’en avez jamais vu. Et qui prouve aujourd’hui que Naughty Dog est sans doute le meilleur studio de développement du monde. Voire de tous les temps. Et je pèse mes mots.
Explications…
Joël et Ellie ont laissé derrière eux les évènements de Salt Lake City. Ils sont partis retrouver Tommy à Jackson, où la communauté de survivants a grossi. C’est même devenu un petit village, ponctué par les tâches quotidiennes et les patrouilles à la recherche d’infectés qui pourraient menacer la tranquillité des survivants.
Ellie a grandi. On la devine majeure, sans doute aux alentours de 20 ans. Elle vit désormais seule dans une maison. Elle est en froid avec Joël. De nombreux flashbacks, dont nous ne révèlerons pas le contenu ici, vous raconteront ce qui a bien pu se passer entre eux et pourquoi ils se sont un peu éloignés l’un de l’autre. Ellie a surtout une intense colère en elle. Cela se remarque dès les premiers instants du jeu. Il faut dire qu’elle est amoureuse de… Dina. Sa meilleure amie. Qui sort d’une relation avec Jesse. Son meilleur ami. Et hier soir, Dina a embrassé langoureusement Ellie… De quoi l’interpeler, l’interroger, la mettre dans une position délicate et embarrassante.
Oui. Je suis comme vous. Avec la claque du premier opus, doté d’un scénario exceptionnel, je m’attendais à autre chose en ce début de jeu. Autre chose qu’une ambiance mièvre et des choix aussi « communautaires » avec l’homosexualité révélée d’Ellie. Avouons-le, ça fait très « on a voulu choquer exprès et aller dans l’air du temps ». Chose qui ne colle pas forcément avec l’ambiance The Last of Us. Durant les deux premières heures, environ, j’ai eu du mal à retrouver ce qui m’a séduit dans le premier jeu. Je trouvais ça « facile », « forcé » et surtout ne me retrouvait pas dans cette histoire, là où en temps que père, j’ai pris en pleine figure les pérégrinations de Joël dans le premier opus. Mais j’ai continué. Et c’est surtout l’écriture magistrale qui m’a fait poursuivre.
Car soyons clair : The Last of Us Part II est sans doute le jeu le mieux écrit de toute l’Histoire du jeu vidéo. Le scénario est une pure merveille. Ajoutez un doublage français très convaincant, un jeu d’acteur exceptionnel, une réalisation sublime… C’est juste, vrai, on y croit, c’est d’un réalisme saisissant dans les comportements des personnages… Bref, c’est totalement bluffant. Ça l’est d’autant plus que la durée du jeu est d’environ 20-25 heures (en prenant votre temps durant les phases de gameplay), et que tout du long, le scénario est d’une qualité incroyable. Du jamais vu. Avec des cinématiques à foison qui ont le juste ton, le juste propos et une durée millimétrée.
Car c’est une vraie histoire que vous allez vivre. Le gameplay est rythmé par des cinématiques de grande classe, d’une qualité folle, qui jamais ne vous perd dans cette aventure complètement folle. Tout est plausible. Tout est joué de manière vraie…
Mais revenons à Jackson.
Vous allez donc jouer Ellie, mais aussi Joël, durant quelques missions de surveillance et d’élimination d’infectés. Vous allez aussi jouer Aby, un nouveau personnage, qui mène un petit groupe de survivants.
Je vous l’ai dit. Le début est un peu lent, semble un peu « forcé ». Jusqu’à une scène d’une intense violence. Un coup de massue scénaristique où Aby va tuer une personne proche d’Ellie. D’un seul coup, le scénario plonge dans une violence pure et sauvage. Sale et dérangeante.
Ellie va donc décider de quitter Jackson et traquer chaque membre du groupe d’Aby. Pour se venger. Et les éliminer un par un. Sans pitié ni remord.
The Last of Us Part II est une histoire de vengeance. De haine viscérale dans un monde laissé à l’abandon, où la morale n’a donc plus sa place. On tue des enfants. On tue des animaux. On tue des hommes, des femmes. Tout le monde meurt ou peut mourir à tout moment. Oubliez les canons hollywoodiens du cinéma. Personne n’est sûr de terminer le jeu en vie. On voit venir certaines situations. D’autres non. Mais dans tous les cas, personne ne ressort indemne de cette confrontation. Pas même le joueur. Jusqu’à presque haïr ses propres actions de jeu.
Ellie plonge dans un état de pure haine, jusqu’à un point de non-retour. Et on va être témoin de sa perte d’humanité, jour après jour, meurtre après meurtre, sauvagerie après sauvagerie…
La traque va mener Ellie jusqu’à Seattle. Jusqu’à un dénouement inattendu au bout d’une quinzaine d’heures de jeu : au moment de la scène finale… bim. Fondu au noir. Et vous allez désormais jouer Aby. L’ennemie. La méchante. Et durant une dizaine d’heures, vous allez suivre son parcours. Et vous allez comprendre ses motivations. Découvrir sa vie, ses amitiés. Découvrir la vie de toutes ces personnes qu’Ellie a abattu. Et c’est extrêmement fort. Extrêmement intelligent. Vous allez découvrir l’autre côté du scénario. Le côté des « méchants » qui, bien évidemment, sont loin de l’être. Et au fil des heures, vous allez aussi vous prendre d’amitié pour Aby. Découvrir ses failles, ses cicatrices. Découvrir… sa violence, aussi. C’est du pur génie. Ecrit comme ça, je peux paraître excessif dans mes superlatifs. Mais vivez l’expérience et vous vous rendrez compte de l’intelligence scénaristique. Ce n’est pas nouveau, l’idée de faire découvrir « l’autre côté du miroir ». Mais ici, chaque scène renvoie l’écho de ce que vous avez vécu dans la première partie, amplifiant la folie d’Ellie, sa rage meurtrière et, quelque part, son comportement injuste et sans pitié. Et encore une fois, le scénario est d’une telle justesse, d’une telle précision, d’une telle intelligence que vous n’en ressortirez pas indemne.
Jusqu’au dénouement, où vous ne saurez plus pour qui prendre cause. Où vos certitudes laisseront place au doute. Aux doutes.
C’est fort. C’est sublimement pensé et maîtrisé. C’est un pur chef d’œuvre.
The Last of Us Part II est à nouveau une claque. Mais dans un tout autre registre que le premier opus. Et finalement, on se dit que c’est assez magistral, quand aujourd’hui le scénario passe trop souvent au second plan dans les jeux vidéo… ou même dans certaines séries TV, où il se retrouve trop fréquemment dilué pour tenir sur 8 ou 10 épisodes. Ici, c’est 20 à 25 heures de pure intensité que vous allez vivre.
Alors oui, il y a des phases de gameplay. Qui rajoutent forcément de la durée de vie aux cinématiques. Mais elles s’intègrent parfaitement dans le scénario et dans l’ambiance. Et vous les jouerez finalement comme Ellie les aurait vécues : de manière glaciale, sans pitié, traquant chaque ennemi pour ne pas en laisser un seul vivant… Et les petites remarques qu’elle fait régulièrement vous poussent d’ailleurs en ce sens.
Cette jouabilité, d’ailleurs, se calque sur celle du premier opus. En l’améliorant légèrement. On retrouve les confrontations face aux infectés. On fait face aux différentes catégories d’infiltrés, certains réagissant dès qu’ils vous voient, d’autres dès que vous faites du bruit. Il y en aura d’autres, que vous découvrirez au fil du scénario, et qui vous donneront du fil à retordre.
On passe son temps à ruser, à jouer la furtivité plus que l’affrontement direct. C’est le cas aussi face aux humains. Les ennemis sont nombreux, souvent bien organisés et parfois même accompagnés de chiens au flair infaillible… Et toujours, une intensité folle, doublé parfois d’une peur panique dans certains endroits, clos en général. On alterne d’ailleurs avec brio ces moments de guerre totale, la plupart du temps en extérieur, à dézinguer les ennemis en les faisant tourner en bourrique, en les contournant ou en les attirant à l’écart de leurs alliés, comme une tueuse implacable et presque invincible, et les moments de tension extrême dans les lieux plus fermés, à ne savoir qui va vous bondir dessus. Et ce même si la capacité d’Ellie (ou Aby) à « écouter » et ainsi définir l’emplacement de ses adversaires est salutaire et indispensable. Mais pas infaillible…
Certes. L’IA est encore une fois très perfectible. Quelques comportements sont un peu tirés par les cheveux et certains ennemis ont une vision proche de celle de Gilbert Montagné. Certaines réactions sont d’ailleurs très prévisibles, ce qui facilite leur élimination. Mais dans l’ensemble, le jeu vous donnera quand même beaucoup de fil à retordre, en difficulté normale. On vous laisse imaginer les autres niveaux de difficulté… Et puis l’IA n’a finalement que peu d’importance, à bien y réfléchir…
On se courbe, on rampe parfois, on contourne pour poignarder discrètement, parfois on n’a pas le choix, on défouraille… on se cache derrière les obstacles, derrières des caisses, dans les hautes herbes… ça reste basique et similaire au premier jeu, mais ça reste finalement très efficace et on prend plaisir à évoluer dans le jeu. C’est aussi surtout grâce à un level design bien ficelé qui offre de très nombreuses possibilités d’avancée ou de combat. Chaque endroit regorge de plusieurs passages, de plusieurs façons de contourner ou éviter ses adversaires…
En parlant du level design, les extérieurs ont souvent (surtout dans la première partie du jeu) de grandes et larges zones ouvertes. De quoi vous offrir, si vous le souhaitez, la possibilité de fouiller. De nombreux bâtiments où vous ne trouverez pas grand-chose… mais des « pas grand-chose » qui pourront faire la différence au fil du temps. Des balles, des matériaux pour construire des mines, des silencieux, des munitions, des explosifs, des médikits… et j’en passe. On retrouve en effet ce même petit côté RPG (très léger) à trouver des objets pour fabriquer des munitions et autres consommables. De la même manière, vous pourrez améliorer vos compétences (furtivité, efficacité des medikits, nombre d’objets fabriqués avec des matériaux, nombre d’objets portés sur soi, précision…) ou vos armes (stabilité, dégâts, nombre de munitions, ajout d’une lunette…). C’est très léger, comme je vous le disais, mais ça a le mérite d’exister et de vous obliger à faire certains choix, notamment en termes de gameplay.
Bref, il faudra tout fouiller. Certaines zones anecdotiques donnant parfois lieu au déclenchement d’une cinématique qui ajoutera à l’ambiance, au scénario, à l’histoire des personnages… Et si vous passez à côté, ma foi… et bien vous ne serez pas pénalisé en ce qui concerne la trame principale. Ce n'est forcément grave sur le fond. Mais voilà, sachez qu’il y a plein de petits secrets à trouver un peu partout. C’est ce qui fait aussi la richesse du jeu et la richesse de son level design.
Vous allez donc évoluer dans des bâtiments en ruines, dans des boutiques délabrées, des détritus, des meubles ou objets sans intérêt jonchant le sol. De la poussière, de l’humidité, de la crasse partout. Le niveau de détails est bluffant. On appréciera aussi de trouver de nombreuses notes laissées par des gens qui sont passés par-là, donnant de l’épaisseur au monde, de la vie à l’univers, et permettant de suivre quelques petites histoires tragiques d’une humanité dévastée.
Un niveau de détail exceptionnel, disais-je, tant en intérieur qu’en extérieur. Car en plus d’être monumental scénaristiquement parlant, le jeu est d’une beauté sidérante. Les décors sont sublimes, les personnages sont magnifiques, les textures de la peau, des vêtements… une claque visuelle. La gestion des lumières et des particules est un enchantement, le… euh… d’accord, vous allez vous dire que décidemment, j’en fais trop. Mais vraiment, The Last of Us Part II est une véritable claque. A tous les points de vue. Rien que de vous en écrire le test, j’ai envie de relancer une partie. D’y retourner. De m’y perdre à nouveau.
Voilà.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce The Last of Us Part II. Beaucoup. Parler de la verticalité, très utilisée dans le jeu. Que ce soit par les ennemis, que ce soit par vous pour surprendre ou contourner les ennemis. On pourrait lui reprocher toujours une certaine rigidité dans le gameplay. Un certain manque de nouveauté, aussi au niveau du gameplay. Peu importe. Ce n’est ni un problème, ni une déception, à bien y réfléchir. Tout est balayé par l’écriture du scénario, par l’ambiance, par l’écriture des personnages, par les rebondissements, parfois inattendus, parfois malheureusement attendus mais auxquels on espérait échapper.
The Last of Us Part II est très différent, dans son propos, dans son approche, dans son ton, dans son ambiance, du premier opus. Ça n’en est pas moins une putain de claque. Une énorme claque dans la gueule, assénée avec une violence folle. A vous en vriller les tripes de douleur. De honte aussi, parfois. Une cruauté sourde et froide qui vous prend au cœur, pour peu que vous fassiez l’effort de vous plonger dans cet univers. Un jeu ultra-mâture, à ne pas mettre entre toutes les mains.
Mais bon sang, quel génie.
Vous l’aurez compris, donc. The Last of Us Part II nous a scotché. Ce n’est pas l’histoire que l’on aurait aimée pour Ellie, Joël, Tommy et leurs amis. Mais c’est l’histoire que Naughty Dog a décidé pour ses personnages. Et on ne peut que saluer leurs choix. Leur audace. Le fait de nous avoir entraîné dans une histoire originale et inattendue. Et de l’avoir fait avec tant de maestria.
The Last of Us Part II est un pur chef d’œuvre.
C’est tout ce qu’il faut en retenir.
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The Last of Us Part II (PS4)
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