Publié le Dimanche 23 septembre 2018 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du dimanche

La solution, c'est l'écrou

Comme je vous l’ai expliqué dans l’Edito de dimanche dernier, j’ai donc passé la semaine hors du foyer, à dispenser mon savoir à quelques brebis écervelées que j’essaie, parfois aux forceps, de transformer en loups.

Quelques taches sur les murs et sur le sol témoignent d’ailleurs de la nécessité d’imposer parfois son autorité et je viens d’avoir carte blanche de la part de la Direction pour « motiver les élèves » et « stimuler leur attention » de quelque manière que ce soit.
J’ai donc choisi l’écrou.

Pour les bricoleurs, j’ai choisi du M12. Suffisamment petit pour ne pas prendre trop de place dans la poche, vole bien, peut crever un œil si bien lancé. Et puis, M12, c’est aussi un modèle de chez Beretta. Donc ça fait un peu lien au niveau de l’utilisation.
L’écrou, au final, c’est top. Le paquet de 100 ne coûte presque rien et c’est comme à la mer : parfois, tu fais des ricochets et tu chopes trois élèves d’un coup.
Pour le moment, je n’ai acheté qu’un seul paquet. Généralement, dès le premier lancer, toute la classe devient bizarrement très concentrée et très attentive.

Mais bon. Comme on dit, hein, y’a plus de respect. Moi j’ai connu les profs à qui les élèves offraient des dessins (bon, ok, en maternelle, mais quand même). Des profs à qui les élèves offraient des cadeaux à Noël (la petite boîte de chocolat qui va bien). Parfois, un élève laissait une pomme bien juteuse sur le bureau en quittant la classe. J’ai même connu des élèves qui offraient un coup à boire à leur prof après la journée.

Et là, que dalle. Pas un Smarties. Pas un Mickey rapidement griffonné sur un coin de serviette. Pas même un trognon de Golden. Alors pour la petite bière, n’en parlons pas.

Génération de salopiauds, va. Sont pas près d’avoir la moyenne, tiens. Z’ont pas compris comment marche le monde. Pourtant, je cite Le Parrain, Serpico, Scarface, Cop Land ou même Les Incorruptibles en n’oubliant pas de souligner que chaque homme a son prix et que le mien se boit et a été fermenté. Mais rien. A c’t’âge-là, ça ne comprends pas les sous-entendus…

Heureusement, reste mon doux foyer pour me ressourcer le week-end. Reprendre de l’énergie Pure Malt et me refaire une santé au houblon.

Enfin… mon « doux foyer »… je vous parle des 30 min à attendre sous un abribus devant la gare, comme un clodo, avec mon sac de linge sale « oups désolé, on a oublié l’heure on était au restaurant avec les filles » ? Je vous laisse imaginer la scène. Assis sur mon banc avec le néon blafard qui clignote au-dessus de moi. Je ne m’étais pas rasé de la semaine, j’avais des godasses trouées et un jean dégueu après avoir accroché une bagnole mal garée sur le trottoir. Résultat, j’ai dû expliquer à la Croix Rouge que non, j’attendais ma femme et mes gamines, que je n’avais pas besoin d’un lit dans un hôtel ce soir, non, pas de soupe chaude non plus, et non, ta tente Quetchua, tu peux la garder, je doute de pouvoir la planter dans mon salon. Au final, ils voulaient absolument « m’offrir de la chaleur humaine » et j’ai dû leur lancer des écrous à eux aussi pour qu’ils comprennent et me foutent la paix, tiens.

Les écrous, c’est la solution à tout, je vous dis. En plus, l’avantage, c’est que vous pouvez faire l’innocent. La bagnole qui vous grille la priorité sur le passage piétons, vous pourrez lui lancer un « ah mais non, ce n’est pas moi qui ai explosé votre pare-brise arrière avec un écrou ». Voyons, qui se baladerait avec des écrous en poche ? Ce n’est pas sérieux !

Bref, achetez des écrous. Ça vole mieux que les vis ou les clous.