Publié le Jeudi 18 octobre 2012 à 10:27:00 par Laurent Benoit

 

Scandale : La Wii U et l'iPhone 5 fabriqués par des enfants chinois

Tu la veux ta console ? Alors commence par lire le plan de montage, petit

Qui a dit que Electronic Arts était la pire société du monde ? Après les suicides, les émeutes, les manifestations, les grèves, les suicides, les clauses anti-suicide et les re-suicides, c'est au tour des mineurs d'être introduits dans les chroniques secrètes de l'enfer de la hi-tech. Et on ne parle pas de type avec des lampes sur le front et le visage tout noir de crasse, mais d'enfants. 

Dans un communiqué à Reuters, le sous-traitant Foxconn a reconnu du bout des lèvres que des mineurs avaient été employés pour de l'assemblage de "biens de consommation" pour trois semaines. La direction de l'entreprise a quand même voulu se dédouaner, précisant à CNet que des têtes allaient sauter.

"Ce n'est pas seulement une violation des lois chinoises, c'est également une violation de la politique interne de Foxconn et des mesures immédiates ont été prises afin de renvoyer ces salariés à leurs institutions éducatives. Nous n'avons pas trouvé de preuve de violations similaires dans d'autres sites en Chine, mais nous n'hésiterons pas à prendre des actions immédiates si de quelconques violations sont découvertes."

Il aura fallu que l'ONG China Labor Watch enquête, fouille, et saisisse à nouveau les médias locaux pour forcer Foxconn à finalement publier ce communiqué

Les mineurs sont des adolescents entre 14 et 16 ans, scolarisés dans des lycées professionnelles. Dans les interviewes radio, une étudiante de 14 ans explique sous anonymat s'être faite virer parce qu'elle est tombée malade. Le quotidien dans l'usine ressemblait en à un camp de travail :

"J’ai fait de la manutention, je les ai aidé à transporter de la marchandise. Ici, l’équipe de nuit débute à 19h40 [et travaille] jusqu’au matin… sans qu’on sache avec certitude de quelle heure il s’agit, vous voyez. Ce n’est que lorsque le travail est achevé que vous pouvez quitter votre poste.

Si vous ne terminez pas le travail, le contremaître ne vous laissera pas quitter votre poste. La plupart du temps, vous pouvez quitter vers 7 heures du matin. Mes bras sont douloureux à cause du travail".

Les enquêtes des journaux chinois GameQQ et Sina ont révélé que les chaîne de production qui employaient les gamins étaient dédiée principalement à la Wii U de Nintendo, qui connaît des problèmes d'approvisionnement pour le marché américain, et également aux produits d'Apple, notamment l'iPhone 5, source de trouble majeurs dans l'usine, puisqu'il est actuellement réclamé par la Terre entière.

Là où l'affaire prend une tournure bizarre, c'est quand ces derniers expliquent à la radio nationale du parti que ce sont leurs professeurs qui les ont forcé à travailler, menaçant de ne pas leur délivrer leurs diplômes s'ils n'allaient pas filer un coup de main à Foxconn. Si les établissements peuvent tout à fait envoyer des stagiaires aux entreprises chinoises, leurs âges doivent être conformes aux réglementations, ce qui n'était pas le cas dans cette situation.
Le fait d’employer des mineurs, sous la contrainte physique qui plus est, est une violation des lois internationales sur le travail. En Chine comme en France, l’âge légal pour commencer à travailler est fixé à 16 ans. En Chine, les travailleurs "jeunes" comme on appelle cette tranche 16-18, sont aussi soumis à des emplois aménagés spécialement, afin de leur éviter tout risque grave physique ou pressions managériales de leurs chefs.

Si China Labor Watch concède que les premiers coupables sont les professeurs, l'ONG souligne cependant dans son rapport que Foxconn aurait dû vérifier l'âge des adolescents, et  demande au gouvernement d'améliorer le système actuel mis en place par les écoles chinoises.
De leurs côté, nos confrères de Kotaku, goguenards, ne se privent pas de rappeler la promesse de Charlie Scibetta, directeur de communication chez Nintendo of America, qui avait dit en 2010 que Nintendo n'hésiterait pas à menacer ou à quitter tout partenaire dont elle apprendrait l'utilisation d'enfants au travail ou la transgression des directives du géant japonais.

Foxconn fournit des dizaines de boîtes électroniques et hi-tech, citons entre autres Cisco, Toshiba, Nokia, Dell, HP, Microsoft, Motorola, Sony et Samsung. L'usine chinoise fait travailler 1,2 millions de personnes, c'est l'un des premiers employeurs du pays du dragon et l'un des premiers fournisseurs internationaux de matériel électronique. Ce géant taïwannais a en effet su fédérer la quasi-totalité des grosses firmes hi-tech grâce à une compétitivité prix reposant sur une main d'oeuvre docile, et des délais de productions toujours plus courts, mais toujours tenus. Malgré des séries d'évènements cités en début d'article qui se succédent de plus en plus fréquemment depuis deux ans, le point culminant des tensions résultant en une spectaculaire menace de suicide collectif de salariés, réfugiés sur le toit du siège social.

Si un premier dialogue social a permis une petite revalorisation des salaires et des conditions de travail, cela n'aura été qu'un seau d'eau versé sur l'incendie social par les patrons de Foxconn, décidés à continuer de manager leur entreprise comme ils l'entendent. L'entreprise n'est pas seule, HEG Electronics ayant aussi récemment été accusée d'utiliser des enfants pour le compte de Samsung, qui s'est aussitôt défendu en se détachant de toute responsabilité comme le font Apple et autres clients occidentaux soucieux de conserver une bonne image. 
Apple avait même lancé à l'époque des suicides une enquête personnelle, qui s'était révélée plutôt laconique et avait été réfutée par plusieurs mouvements chinois de défense des conditions du travail.

Concernant Nintendo, la firme a déjà été mise en cause par plusieurs  groupes d'observation économiques ou humanitaires, pour son habitude à détourner le regard en faveur de promesses calendaires. La firme a dernièrement été accusée de traiter avec des sous-traitants de la République Démocratique du Congo (Congo Kinshasa) impliqués dans un sanglant traffic de minerais destinés aux cartes électroniques du constructeur japonais. 
Bien qu'ayant démenti par principe, plusieurs ONG ont accusé Nintendo d'être la seule entreprise à ne pas se soucier du tout de la situation locale (le Congo étant ravagé depuis maintenant 50 ans par une guerre civile alimentée par les trafics et la corruption).

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