Publié le Samedi 9 mai 2020 à 12:00:00 par Paf!
La chronique cinéma de Paf ! : Hors normes
Amour et intégration
avec Vincent Cassel dans un des rôles titres
ça vous parle?
Alors voilà: on dirait qu’on aurait quitté la banlieue et son dépressif
« Jusqu’ici, tout va bien »,
pour Paris-Belleville et un « On va trouver une solution » d’une rare humanité.
Sauf qu’on est toujours « Hors normes »…
Le duo de choc du cinéma populaire français a encore frappé et après le décevant « Samba » sur le thème de l’immigration, il frappe cette fois juste et fort sur le plan des valeurs simples : humanité, humilité, bonté, générosité, abnégation, intégration... Si comme disait Gide, « c’est avec de beaux sentiments qu’on fait de la mauvaise littérature », Toledano et Nakache prouvent une nouvelle fois qu’on peut en user pour faire de bons films. Même si la comédie n’en est pas exclue, « Hors normes » fait certes moins rire qu’« Intouchables » ou « Le sens de la fête » mais l’émotion règne comme encore jamais auparavant chez les Tole-kache. Et le cinéma, c’est l’émotion.
Suivre un temps l’odyssée de ces belles personnes que sont Reda Kateb et Vincent Cassel fait admirablement ressentir au spectateur le quotidien en toboggan émotionnel des familles / accompagnants / personnel médical ayant à vivre et gérer la difficile question de l’autisme adulte dans une société institutionnelle cherchant à l’ignorer. Voire à l’inexister, à grands renforts de médicaments et de camisoles de force.
Kateb, Cassel, le jeune black, … sont admirables de gentillesse et de sincérité, tout comme Hélène Vincent en mère, le jeune autiste Joseph, la médecin Catherine Mouchet ou l’hilarant bénévole gastronomique Alban Ivanov, sans oublier le duo de choc des inspecteurs de la santé : Suliame Brahim et Frédéric Pierrot.
Petit aparté : ce bel acteur tournait voici peu avec Isabelle Adjani dans une pièce tiré d’un film de Cassavettes - « Opening night » - et il y est extraordinaire. Courrez y si elle devait reprendre à l’automne, cet hiver, au prochain printemps… Magnifique !
Comme disait de mémoire Coluche: « La comédie fait vivre le cinéma français, mais c’est les drames qu’on récompense » et les Césars 2020 n’ont pas manqué d’ignorer ce petit bijou d’humanité : 8 nominations, aucun César. En ces temps de confinement, voir vivre et se battre ces quasi-bénévoles est un coup de pied au cul à nos égoïsmes et égocentrismes exacerbés, mais fait s’interroger gravement sur le quotidien actuel de ces ‘associations du cœur’ et de cette belle bande d’enfoirés. Les lycéens, eux, lui ont donné leur César. Merci !
Pas de Césars de la profession certes, mais après tout, est-ce du Cinéma?
Avec un grand C comme dans Critique Couillu des Cahiers?
Poser la question est déjà à mon sens symptomatique des préjugés du questionneur, plus que du cinéaste ou du film prétendument analysé. Et généralement, ce sont les mêmes qui dénient à la comédie française son caractère cinématographique mais qui portent Chaplin aux nues, en même temps que l’hilarant Garrel ou le rabelaisien Rohmer.
Toutes les comédies françaises ne sont certes pas de grands films de cinéma, très loin s’en faut, mais Tati, mais Rappeneau, mais de Broca… Ici, hors émotion, « Hors normes » est également un beau film de cinéma. Contrairement à leur habitude d’images léchées et de plans parfaits, Toledano et Nakache promènent ici une caméra foutraque particulièrement bienvenue dans les scènes de poursuite et s’acharnent à mettre en scène des dialogues ratés comme au quotidien. Il y a aussi et de façon quasi permanente une absence répétée de profondeur de champ rappelant par la mise en scène la course en avant de ces personnes engluées dans leurs soucis quotidiens et ne pouvant s’autoriser à penser au-delà de l’instant, a fortiori à demain. Les scènes de comédie avec Cassel au restau sont du Toledano-Nakache pur jus – beau plan, belle photo, beau dialogue - et soudain la réalité résonne avec le portable de Cassel rappelé à l’urgence et la caméra s’emballe de nouveau, façon documentaire.
Sauf que contrairement au pessimiste « La haine » précité, « On est pas loin » désormais d’une solution pour tous ces cas d’enfants et d’adultes autistes et un coup de pouce extérieur, tout notamment institutionnel (moyens matériels et financiers, reconnaissance et accompagnement des associations s’occupant d’autistes,…) donnerait un singulier vent de fraicheur à ces Ulysse du quotidien, faute de pouvoir un jour rejoindre Ithaque.
Au cinéma, 5% des profits du film étaient reversés à des associations s’occupant de la question autistique à hauteur d’homme. Si vous ne savez pas quoi faire de votre temps et des économies que vous avez faites sur l’essence depuis deux mois, allez leur faire un petit coucou. Par exemple sur https://lesilencedesjustes.fr.
Regardez « Hors normes », votre humanité y vibrera certainement grâce à une rare conjugaison de talents d’artistes divers au service d’une belle cause : vous divertir intelligemment. Le film est disponible sur la plupart des plateformes, par exemple sur celle d’ARTE : 5 € pour un visionnage, 12 € à l’achat.
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Toujours du gris, du triste et pas de fun. Le ciné Français doit forcement avoir un côté sociale, peux importe le sujet.
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l'as-tu vu? Je l'ai pour ma part trouvé à la fois fun et grave, ce dont j'essaie de me faire l'écho dans ma chronique; On est loin des frères des frères Dardenne et d'un film plombant.
A contrario, les deux derniers excellents films américains que j'ai vu au ciné avant confinement (Clint Eastwood et Todd Haynes) étaient également graves et sociaux: Richard Jewell sur pouvoir médiatique et terrorisme; Dark waters sur pouvoir industriel et dégats écologiques et humains, proche à la fois des magnifiques Erin Brokovitch et Michael Clayton. Film social sérieux ne veut pas dire forcément chiant et à l'inverse, la comédie française n'est pas forcément sociale.
Je viens de revoir Le magnifique avec de Broca et entre torrents de sang et auto-foutage de gueule, ça reste très drôle et moderne.
Bon, confinement oblige, j'ai aussi revu "L'armée des 12 singes" et je ne me rappelais pas qu'il y avait tant de micro-scènes très drôles de cet ancien Monty python qu'est Gilliam.
Les deux à conseiller sans modération!
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Ecrit par Paf
Salut Jymmy,
l'as-tu vu? Je l'ai pour ma part trouvé à la fois fun et grave, ce dont j'essaie de me faire l'écho dans ma chronique; On est loin des frères des frères Dardenne et d'un film plombant.
A contrario, les deux derniers excellents films américains que j'ai vu au ciné avant confinement (Clint Eastwood et Todd Haynes) étaient également graves et sociaux: Richard Jewell sur pouvoir médiatique et terrorisme; Dark waters sur pouvoir industriel et dégats écologiques et humains, proche à la fois des magnifiques Erin Brokovitch et Michael Clayton. Film social sérieux ne veut pas dire forcément chiant et à l'inverse, la comédie française n'est pas forcément sociale.
Je viens de revoir Le magnifique avec de Broca et entre torrents de sang et auto-foutage de gueule, ça reste très drôle et moderne.
Bon, confinement oblige, j'ai aussi revu "L'armée des 12 singes" et je ne me rappelais pas qu'il y avait tant de micro-scènes très drôles de cet ancien Monty python qu'est Gilliam.
Les deux à conseiller sans modération!
Je n'ai pas vu le film, même si je connaissais le pitch et vu la BA quand il était au cinoche.
Mais parlons par exemple d'Eric Brokovitch.
Il y a plusieurs chose qui font que c'est un bon film, par rapport à un "film" français social (par exemple ceux de Dardenne Lioret). Et qui manque des les 3/4 voir plus du cinéma Français.
Déjà les acteurs sont interchangeables, remplace Cassel par Gilles Lelouch, remplace Reda Kateb par Tahar Rahim ou d'autres (bad boys). Tu auras le même film.
Ensuite, l'évolution, dans une majeur partie des films "sociaux", les personnages n'évolue pas. Ils suivent une ligne du scénario, mais ils ne changent pas. tant au niveau expression, que façon de jouer.
Et enfin y'a jamais de fin, c'est très souvent sur un plan séquence sans bruit, juste de la musique ou pire le bruit de la rue ou des vagues.
Bordel que ça me saoul ce genre de fin (Le petit Lieutenant). Je sais que ça veut dire que l'histoire "réel" n'est pas fini, mais t'es dans un film pas un documentaire.
J’essaierai de le voir un de ces 4. Mais mon avis est presque déjà fait.
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Quant à ce que tu dis sur l'interprétation, je ne suis pas d'accord: je voyais hier soir "XXX reactivated" et le film n'aurait pas été le même avec IceCube... Non plus qu'avec Dwayne Johnson, mais là, ca m'aurait donné envie de le voir. De fait, tous les acteurs français que tu cites ne sont précisément interchangeables que parce qu'ils sont excellents. Mais ils auraient chacun donner une touche particulière au film. Et pourquoi Bad Boys d'ailleurs, c'est ignorer les 2/3, sinon plus, de leur filmographie, en les cantonnant à des rôles marquants de Doberman et autres Prophète alors qu'ils ont été de formidables Père en détresse et Commandant de sous-marin nucléaire?
Erin Brockovitch aurait été le même film avec Nicole Kidman et Sean Connery, tout en étant totalement différent.
Quant à ce que tu dis sur l'évolution des personnages, cela s'applique plus aux films de genre qu'aux films sociaux, voire d'auteurs. Est-il des blockbusters, des Schwarzy, des Stallone, des films d'horreur où les personnages évoluent? J'ai fini ma soirée d'hier avec "Mississipi burning" et seuls Dafoe et McDormand évoluent au contact de Hackmann et de la situation; tous les autres personnages y sont englués à commencer par le héros du film, Hackmann. "Intouchables" ou "Bienvenue chez les Chtis" était l'histoire de deux hommes évoluant en se frottant l'un à l'autre mais "Hors normes" est particulier parce qu'il s'attache au quotidien de gens qui ne perdent jamais espoir dans une situation désespérée. Y mettre un happy end, leur faire baisser les bras ou au contraire, devenir agressif aurait été aller contre le sens même du film: une chronique inachevée, un instantané à l'instant T d'un combat don quichotesque.
En ce sens, il ne peut avoir de fin.
J'aime bien ce que tu dis sur le sujet et j'essaierai désormais de repérer ces fameux plans séquences dont tu parles et qui me font d'abord penser à "La dolce vita" et aux "400 coups" (à cause des vagues sans doute) mais pas à un 'genre de film social' où ce type de plan deviendrai véritablement un procédé. Comme dans ces films américains, souvent polars, où la louma s'élève du dernier lieu du crime pour nous faire découvrir les toits de banlieue ou les gratte-ciels.
Et pourquoi un film ne pourrait-il pas avoir une fonction documentaire?
Si je suis plutôt d'accord sur ce point avec toi par goût personnel,
aimant Méliès plus que Lumière,
Fellini et Visconti plus que Rossellini,
film de genre, Lars von Trier et Chabrol plus que petit film d'auteur à la française, Philipe Garrel et Truffaut,
il n'empêche que la relatation de la vie par l'art peut-être parfois aussi intéressante, intelligente et belle que sa réimagination. Les Dardenne m'épuisent mais Philippe Lioret et Xavier Beauvois m'enchantent souvent.
La vie est courte, alors jugeons des films à voir en fonction de nos goûts mais laissons leur une chance d'exister en nous - ou pas - en ne les préjugeant pas.
C'est ce que je crois en tout cas.
La preuve: j'ai vu Cobra et tous les Star wars et j'ai hâte de voir "Judy" alors que je ne supporte pas Renée Zellweger. Et je verrai le prochain Bruce Willis alors qu'il faut bien dire que depuis une quinzaine d'années, rares sont les "Red", "Planète terreur" et "Looper"...
Je te souhaite, je vous souhaite un bon déconfinement mais il nous faudra attendre a minima le 1er juillet pour retourner en salles, alors d'ici là, à vos dvd, blu-ray, VOD,... Il est tant de films à rattraper, revoir ou découvrir les yeux grands fermés. "Shining" par exemple, ou "Hors normes"...
Bonnes séances de jeux et de homemovies. Stay safe!
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