Publié le Samedi 18 mars 2017 à 12:00:00 par Cedric Gasperini
La chronique cinéma de Paf ! : Logan III, le crépuscule des Dieux
Des larmes d'adieu
Le crépuscule des Dieux
Début mars, j’ai vu ici passer avec envie mais sans les lire les deux critiques de « Logan » signées Cédric et Sylvain et respectivement estampillées 3 et 4 étoiles sur 5. Ça promettait ! Et je m’étais dit que si ma vision du film n’était pas la leur, ce serait intéressant de présenter une troisième approche : un 5 étoiles absolu à n’en pas douter pour ces adieux à deux de mes héros/interprètes préférés.
Boucle bouclée aujourd’hui donc, non seulement pour Wolverine et Charles Xavier, mais également pour l’équipe ciné de la rédaction de Gamalive sur le sujet : 3e critique de « Logan ».
Il faut dire que Hugh Jackmann et Patrick Stewart ayant annoncé « Logan » comme leur ultime interprétation du griffu et du paralytique, j’attendais avec énormément d’impatience la sortie de ce blockbuster venant clore près de vingt années de formidable compagnonnage entre eux, et entre eux et moi. Mais peut-être que « Trop de désir tue le désir »...
Pour tout vous avouer, je ne sais même pas si je mettrais 3 étoiles à « Logan » tant la première vision de ce film m’a été plus pénible qu’agréable.
Sans doute que la faute n’en revient pas seulement à celui-ci, mais d’abord à moi-même : la saga X-men (avec la trilogie Spider-Man de Sam Raimi) est en effet ce qui se rapproche le plus en termes de plaisir et d’émotion de mes lectures d’enfance de Strange, Titans et autres productions Lug labélisées Marvel. Dans les BD Lug de mon adolescence, on discutait ferme durant des combats plus véritablement époustouflants que brutaux, les personnages étaient tous plus originaux les uns que les autres et bons et méchants naviguaient d’une série à l’autre, d’amitié en inimitié, en vivant, disparaissant, ressuscitant, sans qu’une chronologie formelle et parfaitement exacte ne plombe l’imagination du grand Stan Lee ou des scénaristes lui ayant succédé.
Les bandes Marvel des années 60/70 constituaient sur papier un exceptionnel cinéma pop-corn avant l’heure, où l’inventivité visuelle et scénaristique palliait avec humour aux grosses ficelles psychologiques et dramaturgiques de ces histoires illustrées.
A l’inverse de beaucoup de critiques, de spectateurs et de notre jeune critique ciné Sylvain (je cite son papier: « Wolverine : très moyen, voire très mauvais » !!! « The Wolverine : moyen bon » !), je suis pour ma part un très grand fan des deux films solos du Wolverine qui, l’un après l’autre, augmentent en noirceur et en brutalité, nous faisant quitter Stan Lee, l’enfance et le Serval de la première trilogie pour des versions plus adultes, plus sauvages et plus modernes du Wolverine.
Les ayant revus plusieurs fois depuis leur sortie en salles et venant encore de les revoir avec une jeune ado d’accord avec moi sur leur qualité distractive, je n’ai d’ailleurs jamais bien compris ce qu’on pouvait reprocher à ces blockbusters simples et efficaces:
- interprétation, photographie et production remarquables ;
- mutants intéressants (extraordinaire Liev Schreiber !) et scénario basique mais ingénieux ;
- scènes d’introduction phénoménales : guerres US et Furyo nucléaire sur Nagasaki ;
- jolis moments d’émotion : décès des vieux fermiers et de l’ours, Kayla vivante/morte et parallèle Jean Grey/Mariko
- traitement original : pléthore de mutants et humour potache pour « Wolverine » d’un côté et méchants humains et misanthropisme romantique pour « The wolverine » de l’autre, décrivant bien l’ambivalence du fauve qu’est théoriquement Wolverine,
- sans oublier bien entendu des scènes d’action visuellement formidables : moto contre hélicoptère, combats sur cheminée de réacteur nucléaire, dans les rues de Tokyo ou sur train à très grande vitesse,… et cette magnifique séquence « Roméo et Juliette gore » dans la neige que, fleur bleue, j’apprécie particulièrement :
Que la tendance soit actuellement à faire des films plus adultes, plus brutaux, plus sombres et plus méta-, ce n’est pas moi qui m’en plaindrais mais encore faut-il que l’humour suive si on fait une comédie – le génial « Deadpool » - ou que l’émotion naisse si on fait un drame.
Or « Logan » est un drame d’action. Et je n’y ai ni pleuré, ni vibré.
C’est sans doute cela que je lui reprocherais le plus : n’avoir pas réussi à faire émotionnellement exister les événements tragiques qui s’y déroulent et m’avoir paradoxalement ennuyé durant les scènes d’action ou dramatiques de sa deuxième heure.
Et pourtant, Toshiro Mifune en Sanjuro et le Clint Eastwood de « The gauntlet », « The rookie », « Million dollar baby » ou « Gran Torino » étaient bien là, le Bruce willis de « Last man standing » ou « The last samaritan » aussi… Ainsi qu’envahissant l’écran : l’Alan Ladd de « Shane ».
Malheureusement, « Logan » n’est pas le chef d’œuvre crépusculaire que j’attendais pour clore la trilogie Wolverine et la carrière de son interprète dans le rôle.
Mais je ne saurais trop vous conseiller d’aller le voir, ne serait-ce que pour son excellente distribution et parce que cela donne envie de revoir Jack Palance dans « L’homme des vallées perdues ».
Déjà, le film commence mal parce que depuis 18 ans, la marque de fabrique des bons films X-Men est leur séquence d’introduction émotionnellement et visuellement exceptionnelle, qu’elle ait pour décor les camps d’extermination nazies, la Maison Blanche, les guerres US 1860-1980 ou encore l’explosion nucléaire à Nagasaki en août 1945. Or « Logan » déroge à cette règle alors même que le tacheron Brett Rattner avait réussi à y obéir avec humilité dans « The last stand », en nous y présentant la maison d’enfance et les dons de Jean Grey.
En voulant dès le début inscrire son film dans une perspective Crépuscule des Dieux, James Mangold rate complètement son introduction, qui en devient misérabiliste : la maladie, la pauvreté, la faiblesse, la vieillesse, l’alcoolisme de Logan aurait aisément pu nous être dévoilée d’une manière aussi sombre mais plus spectaculaire, que par le biais de cette petite baston minable avec de vulgaires voyous sur un parking désert ! Celle-ci ressort plus d’une imagerie polar glauque Europacorp avec Liam Neeson, que d’un blockbuster à gros budget, et a fortiori d’un film X-men.
D’un point de vue visuel, tout le reste du film sera d’ailleurs à l’envi : « Logan » ne comprend aucun décor exceptionnel, réel ou numérisé. De fermes isolées en champs de maïs, de routes en forêts, on est dans un road-movie plutôt cheap que la photographie quelconque du film n’arrive même pas à transcender. Où est le grand cinéaste James Mangold du New York XIXe siècle de « Kate & Leopold » ou du Japon XXIe siècle de « The wolverine » ?
Qu’il ait voulu faire de l’ultime aventure du griffu un polar eastwoodien seventies, revisité « Midnight special » (budget 18 Mio $) et mâtiné Johnny Cash, ce n’est pas le fan d’Eastwood, de Jeff Nichols et de « Walk the line » que je suis qui s’en plaindra.
Mais la question que je me posais durant tout le film était : où est passé l’argent qu’a sûrement dû couté « Logan » ? (130 Millions de dollars après vérification!)
Parce que côté effets spéciaux et scènes d’action, c’est également peau de balle et/ou déjà vu mille fois ! Mutilations griffues ou par balles, robotique et paramilitaires caricaturaux, temps arrêté et combats répétitifs. Hormis la brutalité de ces derniers, rien de nouveau sous le soleil depuis les films précédents de la franchise ou certains films de James Cameron ou George Miller que Mangold, ses scénaristes et ses monteurs ont d’ailleurs largement pompé, visuellement et scénaristiquement. Arrivant très vite dans l’histoire, la meilleure scène d’action du film - où l’on découvre les pouvoirs de l’enfant mutant - finit ainsi par une poursuite en voiture filmée et montée comme « Fury road » tandis que le film s’abîme dans sa deuxième heure dans un traitement St Christophe de Wolverine, directement issu de « Mad Max III – Beyond the thunderdome ».
Sauf que le film de Miller était un conte mythologisant une figure christique de Max et gommant la violence des deux précédents opus de Mad Max tandis que Mangold, lui, suit un chemin inverse : il part de blockbusters X-Men presque tout public pour nous en livrer une version sombre et brutale, ainsi que l’ont très bien fait remarquer Cédric et Sylvain dans leur critique. Somptueuse noirceur que je trouve également très réussie mais pourquoi dès lors nous encombrer de ces gosses et de cette petite maison sur la falaise à la fin du film ? A part chez Mel Gibson, bons sentiments et brutalité gore font rarement bon ménage à l’écran, mais le grand Mel serait vraisemblablement allé ici jusqu’au bout du cauchemar et aurait à tout le moins fait mourir quelques-uns de ces enfants mutants lors de la chasse qui leur est donnée.
« Logan » est Rated R, mais pour des adultes aimant la guimauve et des Republicans en mal de représentation christique. Nous balancer « The man comes around » en générique de fin de « Logan », faut oser !
Pauvre Wolverine et pauvre Christ, l’un comme l’autre n’ont rien fait pour mériter cela.
Wolverine comme High Plains Drifter et Pale Rider ?
Il en a les balles et cicatrices dans le torse, il est vrai, mais il ne revient pas de l’enfer, il y vit…
Quant au scénario, il est truffé de belles idées ‘mud’ ou ‘anti-Trump’ évoquées rapidement (le bateau-rêve, le Canada-Eden, l’OGM castrateur), mais également de questions ouvertes et non solutionnées : où sont passées les infirmières qui ont aidé les enfants à fuir ?
Et d’où vient Caliban ?
Et pourquoi Logan ne fume t’il jamais le cigare qu’il a piqué dans un magasin ?
Et d’où viennent les griffes d’adamantium qu’il a perdu dans « The wolverine » et retrouvées dans « Days of the future past » et ici ?
Et quelle est cette maladie frappant et vieillissant l’Immortel ?
Et pourquoi et où et comment Charles a t-il commis le plus grand crime qui soit, lui valant cette anesthésie médica-menteuse auquel le soumet désormais Logan ?
Et s’il s’agit bien de ce je pense – avoir fait explosé son Institut et tué plusieurs centaines de personnes au premier rang desquelles ses élèves et nos héros et amis depuis 18 ans : Jean Grey, Cyclope, Tornade,… -, comment ne pas en parler ouvertement dans ce Crépuscule des Dieux de l’ancienne franchise X-men ?
A défaut de la montrer.
Car bien sûr, en cachets comme en budget FX, la scène aurait coûté à elle seule une ou deux dizaines de millions de dollars à faire, mais elle aurait somptueusement clos dix-huit années de saga cinématographique. L’Apocalypse n’est-elle pas le thème principal de chaque troisième tome des trilogies X-men ?
La dramaturgie du film passe ainsi non seulement à côté des questions très intéressantes qu’il évoque par endroits, mais elle est si bancale qu’elle parvient à faire mourir deux personnages majeurs de notre univers pop-culturel du XIXe siècle, sans créer de réelle émotion chez le spectateur quand ces morts surviennent.
Si le but était ici d’enterrer l’ancien monde pour introduire avec éclat la troisième ère de la franchise en éliminant tous les vieux mutants, Il eut mieux valu en ce sens intituler le film « Apocalypse 2029 » ou « X-23 » (Très bien cette petite d’ailleurs, comme le disait Cedric).
A maints égards, « Logan » m’apparaît ainsi l’inverse raté d’« Unforgiven » (15 M$ de budget) : un film d’action à énorme budget se voulant film d’auteur crépusculaire. Or, s’il est certes parsemé de scènes intimistes réussies entre les vieillards Charles et Logan, elles demeurent incomplètes sur un plan narratif. Or s’il est également parsemé de scènes d’action enfin brutales et gore comme le notait si justement Sylvain dans son article, elles sont redondantes et fort peu inventives, à l’exception peut-être de la scène de l’hôtel d’Oklahoma City où Charles pique sa crise et où Logan trucide avec lenteur et passion ceux qui menacent son vieil ami.
Nul doute qu’une prochaine vision de ce beau film brutal qu’est « Logan » dissipera quelque peu les espoirs que j’avais mis en lui d’être le sommet émotionnel et adulte de la saga X-Men, mais en attendant et puisque nous parlons d’Old friend, je me dois de vous avouer que c’est là que le bât m’a le plus blessé : comment oser nous scénariser les adieux de Charles & Patrick et Logan & Hugh aux X-Men, sans faire la moindre référence à Erik & Ian ?!
Imagine t-on Gandalf mis au ban du 3e opus du Seigneur ou du Hobbit !
Un scandale…
Ou un hommage à Godot peut-être.
Adieu Messeigneurs.
A vous voir ailleurs.
Commentaires
Inscrit le 28/04/2009
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et pourtant je l'ai vu dans d'excellentes conditions:
- IMAX 2D dans une salle toute neuve
- salle quasiment vide on devait être 5 ou 6
- billet à 5€ (je n'ai même pas l'excuse du prix pour le trouver nul)
- VOST
donc mon jugement n'est même pas influencé par les conditions de visionnage. Il est juste long, intéressant, pénible à regarder comme le dit paf.
ce que je ne pige pas, c'est le score qu'il obtient sur internet: 8.6 sur IMDB, classé 56ème meilleur film de tous les temps!? c'est du grand n'importe quoi
et sur rotten tomatoes c'est la même chose
j'ai eu du mal à lui mettre 6/10
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