Publié le Samedi 16 avril 2016 à 12:00:00 par Paf!
La chronique cinéma de Paf ! : Good luck Algeria
Emoi, émoi, émoi…
Emoi, émoi, émoi…
et sa fille
Aussi éloigné de l’égocentrisme parisianniste du cinéma français dramatique d’après Nouvelle Vague que de la comédie starifiée à la française, un émouvant premier film français est actuellement dans nos salles et un metteur en scène prometteur nous est né.
Seulement voici, voilà : que ce soit ici ou là je vous parlais voici peu des communicons et de leur néfaste emprise sur l’art cinématographique. Voilà bien le dernier exemple en date de leur mercantilisme avarié: « Good luck Algeria » de Farid Bentoumi. Que le film soit en l’occurrence « inspiré de faits réels » n’est aucunement rédhibitoire dans la mesure où Bentoumi s’inspire de son histoire familiale, mais la bande-annonce du film est axée sur la comédie, soit sur les gags et les bons mots le parsemant ici et là. Or ce film est bien plus que la comédie que ces sourires et bras levés nous promettent et cela me coûte de vous mettre ici la bande-annonce mais si je ne le fais pas, je me fais taper sur les doigts par mon chef. Et si ca vous donne envie d’aller voir le film, alors tant mieux !
Maintenant, et au cas où vous n’auriez pas encore compris qu’on va être plié de rire, on l’a doté d’une affiche à faire pâlir d’envie Alain Berbérian et Dominique Farrugia réunis.
Un arabe sur des skis, ça vous rappelle quelque chose ?
Un maghrébin aux jeux olympiques d’hiver, ça vous parle ?
Des affiches à la con, torchées par des branleurs de producteur et de distributeur s’essuyant les virgules de leur âpreté au gain sur l’affiche de beaux films, j’en ai vu pas mal dans ma vie de cinéphile, mais là, c’en est une à garder. Je la rangerai auprès de monumentales saloperies racolant le pédophile apposées sur la carte d’identité de bons films, jamais vulgaires, eux !
Attention, je ne vous dis pas que « Good Luck Algeria » est un chef d’œuvre du cinéma français à l’instar des Blier et Tavernier précités. Mais il aurait dû toutefois - comme la rafraichissante comédie noire « Vent de panique » de Bernard Stora en son temps - faire bien mieux que 90.000 entrées en première semaine. Soit le même score que le « Marseille » de Kad Merad en 3e et 6 fois moins que le « Médecin de campagne » de Francois Cluzet en 1ère semaine, pour comparer ce qui est comparable. Personnellement, je l’ai vu il y a trois semaines et scotché par la reconnaissance critique quasi-unanime de la qualité de ce film - de VSD à Positif, du Parisien à Première, en ne passant pas par Les Inrocks, ce qui est également le plus souvent, une preuve de qualité -, je n’avais pas envie d’en parler ici puisqu’aussi bien son succès était assuré et que vous n’êtes guère, chers gam@livers, connectés au cinéma français. Seulement voilà, cet insuccès est à ce point immérité qu’il m’est poussé une plume.
Car tout cela ne serait pas bien grave si « Good Luck Algeria » était effectivement et uniquement une bonne comédie française destinée aux soirées dominicales TF1 de mon enfance. Pourquoi dès lors lui apposer une affiche pareille, digne dans la démarche cinéphilique de producteurs-distributeurs italiens du film de genre des années 70, grands amateurs de Milius, Lucas, Miller, Carpenter, Cameron…
Loin d’être une comédie à se pisser dessus, « Good Luck Algeria » est en effet une émouvante comédie de la plus belle eau. On y parle sans pathos d’Amour paternel, filial, marital, amical,…
Et loin de se dérouler uniquement en Savoie enneigée, « Good Luck Algeria » est aussi et surtout une émouvante comédie algéroise de la plus pure françitude. Car on y parle également - sans jamais tomber dans la démonstration - d’intégration, d’identité nationale, de multiculturalisme, de corruption dans les milieux du sport et de la politique, de français qui se lèvent tôt, de travail bien fait, de perfectionnisme, d’effort, de chômage, de difficulté d’existence des PME,… tous thèmes intéressant au premier chef à les en croire les politiciens de tous bords de notre beau pays où certains citoyens se lèvent tôt pour vider nos poubelles, et d’autres, pour les défendre dans les cocktails ou pour relire tout Racine, se couchent tard, d’après leur Rolex.
Et si « Good luck Algeria » était le film de la prochaine campagne présidentielle ? Avoir pour Président et 1er Ministre des entrepreneurs à la Sami Bouajila et Franck Gastambide prêts à tout pour sauver leur entreprise, sauf à la bassesse, ça nous changerait des technocrates aux mains blanchies par l’usure d’avoir trop serré celles d’Anne Lauvergeon, Henri Proglio, Serge Dassault, Mohamed en Nayef,… et autres terroristes brésiliens et portugais prénommés Carlos.
Personnellement, j’ai été très touché par ce beau petit film qui n'intéressera vraisemblablement pas ceux de mes lecteurs exclusivement intéressés par les blockbusters américains, mais certainement tous ceux, nombreux parmi vous j’en suis sûr, qui apprécient parfois de voir un film français intelligent.
Oh bien sûr, on y disserte pas d’Eros dans une piscine, un semi-remorque, une montgolfière ou une cuisine, mais le premier film de Farid Bentoumi prouve qu’il y a une vie intelligente avant/après La nouvelle vague, Le nouveau roman, La nouvelle philosophie, La nouvelle branlette intellectuelle. Et que cette vie s’appelle la vie quotidienne, celle des parents et des provinciaux, des enfants et des époux, des entrepreneurs et des franco-quéquechose,
Oh certes, ca ne plaque pas au Sol comme le cinéma américain et ca ne fait pas rimer les Si comme le rohmérisme inrockuptible et téléramesque. Ca vous remet simplement en tête le refrain du Fa si la la do ré du grand cinéma populaire français de qualité, déclinant cette Douce France, cher pays de notre enfance, chantée par Charles Trénet, Rachid Taha ou Carla Bruni, et qui est tant décriée chez elle et tant aimée de par le monde. Avec un grand Fa, et son cortège de problèmes de factures, de famille, de facho, de fâcheries, de faillite, de fatigues,…
Une vie faridbentoumiesque, à farter faque vour d’amour et d’efforts, en quelque forte.
Loin de la passion pialatesque, de la misère dardennaise, de la violence noëtaire, du fantastique jeunetien, Bentoumi nous parle de nous, de nos racines, de nos efforts au quotidien et brosse doucement à petites touches un éloge de la simplicité, du travail bien fait, de l’intégrité, de l’ouverture d’esprit, d’Agapè,… sans jamais tomber dans la démonstration du « qu’il est dur d’être chef d’entreprise ! » ou du « qu’il est compliqué d’être un arabe en France / un roumi en Algérie! ».
S’il y a un fort penchant misérabiliste dans le comique dardennais**, il y a un fort penchant comique dans le drame bentoumiesque : avec les magnifiques Sami Bouajila en Père Madeleine, Pattaya en sémillant Gavroche, Chiara Mastroianni en belle mutique, Hélène Vincent en myrielle bonté faite femme et, last but not least, l’extraordinaire Monsieur Bouchakor Chakor Djaltia en Jean Valjean, sobrement intègre et majestueux comme un Lino Ventura moderne.
Tous les acteurs sont magnifiques de naturel et de subtilité ; la rencontre du roumi Bouajila avec l’administration et la corruption algérienne est - pour les connaisseurs - d’une rare justesse; son séjour au Bled extrêmement émouvant et la vie de son père tout simplement admirable. Entendre celui-ci parler de « choix » et de « pommiers » m’a fait pleurer, c’est vous dire ! Courrez donc vite voir « Good luck Algeria » ou précommandez le dvd! C’est pour une bonne œuvre : la France et son cinéma, de distraction comme de qualité, artistique comme humaine.
* J’les ai mises à l’envers pour que vous compreniez mieux le dialogue. J’vous en mets un peu plus ? Ca fait pas grossir :
Je vous renvoie sur le sujet à un entretien de l’un des grands intellectuels français (de droite, ca change !). Pas d’accord cependant sur le rapport « Dolce Vita »/ « Le cauchemar de Dracula » : aucun des deux n’a vieilli !
** les Films du Fleuve des frères Dardenne co-produisent ce film franco-belge nous renvoyant à Ken Loach, un autre de leurs poulains. A cette énorme différence près que ce sont ici des entrepreneurs au grand cœur, et non des ouvriers et des déclassés versant dans la criminalité ou essayant d’en sortir qui en sont les héros. C’est p’têt ça que Les Inrocks ont pas aimé ? Parce que vendre son bébé ou siphonner du Malt Mill hors d’âge, alors oui, ça, c’est réaliste et drôle, mais des entrepreneurs au grand cœur et des époux qui s’aiment, ça nous éloigne quand même par trop des réalités de ce monde et des combats nécessaires !
Commentaires
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peux-tu me définir fun stp?
"Good luck..." est à la fois drôle et émouvant comme l'était "Rasta ..." en son temps. Va le voir et dis-moi ce que tu en a pensé.
***
Kon'nichiwa Yutani,
vu avant-hier "The sinking of Japan" ( Shinji Higuchi, 2006) qui ne ne me tentait pas trop non plus, mais c'était un honnête film catastrophe très bien interprété à la Emmerich. Allez, un ptit effort, va voir "Good luck ...", ce sera peut-être à ton goût.
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Une vie faridbentoumiesque, à farter faque vour d’amour et d’efforts, en quelque forte.
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Non, non, ce n'est pas une contrepèterie, juste une toquetoquerie allitérative zozotée:
_ Toctoc
_ Qui est là?
_ C'est Sophie.
_ Sophie qui?
_ Sophie Fonfaicque, cornichon!
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