Publié le Dimanche 21 décembre 2014 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du dimanche

C'est aussi ça, l'esprit de Noël

Oui, je sais. L’esprit de Noël, la joie, la gentillesse, tout ça. Les cadeaux confectionnés par les petits lutins qui chantent des chansons de Noël dans lesquelles les hivers sont toujours neigeux et joyeux. Les rennes qui tirent le traineau. Le Père-Noël qui fait « ho ho ho » et distribue les paquets. La dinde fourrée. Les marrons chauds…

Seulement désolé, plus les années passent, plus j’ai du mal avec tout ça. Nan, j’ai beau y réfléchir, retourner la question dans tous les sens, Noël m’emmerde.

Alors attention, hein, tout n’est pas non plus à jeter, à Noël. Déjà, on trouve – plus facilement – du Panettone. Une brioche italienne succulente qui se déguste traditionnellement durant les fêtes. Bon. En fait, je ne sais pas pourquoi je vous parle de Panettone. Je ne sais même pas pourquoi c’est en haut de ma liste, là, tout de suite. Vu que je n’en mange pas. J’en achète, certes, mais le temps que je me demande si je vais en prendre une ou deux parts, mes gamines et ma femme se l’ont déjà engloutie en entier. Même la petite dernière, là, qui me les brise menu-menu tout au long de l’année parce qu’elle ne veut rien manger au petit-déjeuner, se jette par contre comme une morte de faim sur cette saloperie de brioche. Parfaitement, on a l’impression qu’elle se prive toute l’année pour se rattraper quand le Panettone arrive. Enfin bon.

Et puis j’aime bien offrir des cadeaux. Mon banquier, lui, nettement moins. L’a pas l’esprit de Noël ce bâtard. Mais moi je continue quand même à offrir des cadeaux. C’est comme ça.

Le foie gras j’aime bien aussi. Sur du pain ou du pain d’épices. Mais pas de pain mie. Chacun ses goûts. C’est aussi l’occasion de sortir un bon champ’ et/ou une bonne boutanche de vin. C’est chouette ça aussi. Les rues illuminées, j’aime bien également.

Mais personnellement, tout en haut de la top liste des meilleures choses qui arrivent à Noël, je placerais le sapin. Tout à fait. J’adore les sapins de Noël. C’est mon kif, le sapin de Noël. Mais attention, hein. Premièrement, un vrai sapin. Pas une de ces saloperies en plastique. Ensuite, un sapin décoré avec goût, selon moi, c’est un gros sapin touffu avec plein de bordel dedans. Je déteste les sapins monochrome, façon post-modernisme de mes couilles. Noël, ça doit t’éclater les yeux avec sa myriade de couleurs brillantes et ses guirlandes scintillantes dont il y a toujours une petite lampe de merde qui claque et dont vous n’avez jamais la bonne rechange. Les sapins « tous bleus » avec la guirlande « toute blanche » qui ne clignote pas, je trouve ça nul. Ça me donne envie d’y foutre le feu.
Mais par-dessus tout, j’adore quand ça sent le sapin. Pas étonnant venant de moi, direz-vous. Mais oui. J’aime l’odeur du sapin au petit matin. J’aime l’odeur du sapin quand on passe devant les boutiques qui en vendent. Ce qui peut amener cela dit des situations dérangeantes quand on me demande d’arrêter de les renifler et leur faire des câlins. Mais je n’y peux rien. L’odeur du sapin, c’est un plaisir ultime.

Les repas de Noël m’emmerdent. Interminables. En fait, je déteste rester trop longtemps à table de manière générale. Ça me gonfle. Je déteste voir défiler une dizaine de plats dont je ne mangerai pas la plupart, d’ailleurs. Et de toute manière, on en est tous au même point : on n’a plus faim après les petits fours servis à l’apéro. « Oui bien tu n’as qu’à pas manger les plats alors » allez-vous me dire. Certes. C’est effectivement la bonne solution pour s’emmerder encore plus. Car il n’y a rien de plus gonflant et pénible que de regarder les autres s'empiffrer et d’attendre qu’ils terminent, qu’on apporte enfin la bûche et que vous puissiez vous barrer non merci pas de café je suis crevé je vais rentrer de suite. Alternez une année sur deux le « je suis crevé » avec un « je suis un peu malade » pour varier les plaisirs.
Sans oublier les discussions lourdes et inintéressantes avec des gens dont, finalement, vous ne partagez que le nom. Et encore. Pas tous.
Et vous aurez toujours l’oncle/frère/père/cousin/grand-père (rayez les mentions inutiles à moins de les garder toutes) qui sortira ses certitudes racistes, expliquant à une assemblée déjà conquise que la crise et la ruine de la France, « c’est la faute aux arabes » qui d’ailleurs viennent violer nos filles et nos femmes avant de partir faire le djihad et apprendre à tenir une arme alors qu’ils feraient mieux d’apprendre à tenir un balais pour nettoyer correctement nos rues. Et non, rien à voir avec le fait qu’il soit bourré. Il disait la même chose avant d’avoir bu son premier verre. Là, il le répète juste un peu plus fort.
Et vous aurez toujours la tante/sœur/mère/cousine/grand-mère (rayez les mentions inutiles à moins de les garder toutes) qui lancera, offusquée jusqu’au bout du vagin, qu’elle a vu deux hommes s’embrasser dans la rue et que JésusMarieJoseph c’est une honte, que la société est décadente et que le mariage pour tous est une hérésie, bafoue l’idée même du sacro-saint mariage. Pire encore : l’adoption pour les gays, c’est la porte-ouverte à la pédophilie. Et puis quoi encore ? Faire comme ces pédés de danois qui autorisent la zoophilie et bientôt permettre d’épouser son canard ?
Sans oublier bien entendu le beau-frère dont les seuls sujets de conversation sont le tunning et les vannes que même Carambar n’a pas voulu, c’est dire le niveau. Non, les fêtes de famille en général, mais les fêtes de Noël en particulier, c’est un vrai cauchemar.

Bon. Ok. Je brosse un portrait caricatural. Mais avouez que vous avez des trucs du même genre à raconter. Avouez que chaque année, vous quittez la table familiale et dans la voiture, vous vous dites à vous-même « mais bordel, j’ai été adopté, c’est pas vrai » en vous jurant que l’année prochaine, vous ferez tout pour choper une gastro le 24 au matin.
Et si ce n’est pas le cas, si vous ne vous êtes jamais fait ce genre de réflexion dans la voiture, toutes mes condoléances, hein, c’est peut-être quelqu’un d’autre de la famille qui se le dit en parlant de vous…

Enfin bref, les fêtes de Noël me saoulent. En plus, y’a plus moyen d’aller chercher un pot de Nutella au supermarché sans tourner 3h pour trouver une place, faire la queue pendant 1 h à la caisse et mettre 4 heures à repartir à cause des bouchons. Moi j’dis, 8 heures pour un pot de Nutella, vos saloperies de gosses, ils attendront janvier et vont apprendre à quel point finalement, la confiture c’est bon aussi. Oui, même celle qui traîne depuis 8 ans dans le placard.
Moi, les fêtes de Noël, j’ai envie de venger des millions de dindes en fourrant les rennes et le Père-Noël avec des marrons. J’ai envie de passer du Sex Pistols dans les centres commerciaux au lieu de ces putains de chansons avec des clochettes. En plus, il ne neige jamais souvent à Noël. Et ça, c’est nul.

Sans compter ces putains de cadeaux qui vous ont coûté une blinde. D’un côté les gamins ne joueront qu’une fois avec avant de les fourrer dans un placard (dans le meilleur des cas) ou de les laisser trainer au milieu de la chambre histoire de paumer plein de petites pièces avec le temps et vous mettre correctement les boules, comme un message « t’as vu, t’as pas voulu qu’j’ai une tablette, tu vois comment j’en prends soin de ton cadeau ». Ouais mais désolé. T’as 6 ans, t’as pas à avoir de tablette, petite conne.
De l’autre côté, votre famille a toujours le chic pour vous offrir des trucs de merde. Non, j’vous jure, y’a eu un mélange à la naissance, on a tous été adopté, j’vous dis. Vous, vous vous cassez la tête pour trouver des trucs originaux et sympas. Et vous êtes persuadés d’avoir réussi. Qui ne le serait pas ? Un panier de rillettes de canard, bouteille de champagne et foie gras entier d’oie, avec une ou deux petites tapenades en bonus. Des jeux vidéo pour les gamins…
Eux aussi, hein, ils se sont cassés la tête pour trouver des trucs originaux et sympas. Et ils sont persuadés d’avoir réussi. Sauf qu’en fait, il faudra leur avouer un jour que les promos en tête de gondole à Auchan, question « original et sympa », on a fait mieux depuis... depuis toujours en fait. J’veux dire… A la rigueur, offrez-moi des cartouches d’encre pour mon imprimante la prochaine fois. Ça sera plus utile que le pull avec les petits rennes. J’ai pas prévu d’élever des mites prochainement et entre nous, il est juste bon à les nourrir. Non et puis j’ai beau répéter depuis 20 ans que je déteste ce fruit-là, qu’est-ce qui vous a pris tout à coup de m’offrir une saloperie de gel douche à la framboise, hein ? Ou des boules de bain moussant « bio » alors que je ne prends que des douches vu que, oui, vous êtes déjà venus chez moi, vous avez dû voir qu'il n'y a pas de baignoire, non ? Et si tu ne me vois qu’avec des tee-shirts bleus, gris, noirs voire quelque fois blancs, ce n’est pas pour qu’on m’offre à Noël un t-shirt vert, bordel ! Remarquez, même votre femme a toujours des idées pourries genre week-end thalasso-spa ou nouvelle chemise « ah mince j’ai pris du 38 alors que tu fais du 44 ». Alors que franchement, le plus beau cadeau qu’elle pourrait vous faire serait de vous offrir une petite tenue sexy. Genre un ensemble corset, string, porte-jarretelles, bas-nylon. Et non, soyez pas con. C’est pour elle. Doublé d’une folle nuit d’amour avec la TOTALE. Je vous laisse rêveur quant au contenu du mot « TOTALE ». Franchement… quel plus beau cadeau pourrait-elle vous faire, mmmh ?

M’en fous. Moi cette année à Noël, je descends une boutanche de whisky cul-sec avant d’aller bouffer dans la famille. Comme ça, je devrais terminer à poil en train de fourrer la dinde ou en train de pisser sur la bûche glacée en chantant « Happy Birzday to iou P’tit Jésus ». Avec un peu de chance, je gerberai même sur la vieille tapisserie accrochée au mur et qui se transmet de génération en génération. Y’a des fois, faut savoir faire table-rase du passé. Façon rock’n roll.

Je vous souhaite à tous un Fuckin’ Merry Christmas.