Mars : War Logs (PC, PS3, 360)

 

Publié le Lundi 6 mai 2013 à 12:00:00 par Alexandre Combralier

 

Test de Mars : War Logs (PC, PS3, 360)

Retour sur terre

Les Français de Spiders n’ont pas beaucoup d’argent mais ils ne manquent pas d’idées. Armés du modeste Silk Engine et de leur passion pour le jeu de rôle, ils nous livrent un RPG PC et consoles (les versions PS3 et 360 sortiront dans les prochaines semaines) qui tombe assez bien en cette période de relative disette pour les amateurs du genre. N’attendez donc pas de super-production. Mars : War Logs est un jeu à petit budget et à petit prix (19,99 €) qui entend faire la différence ailleurs : par son ambiance, par son scénario, par tout ce qui le fera sortir de la moyenne des jeux du genre. Reste à savoir s’il y réussit vraiment.

screenComme on l’a déjà deviné, l’histoire de Mars : War Logs se passe sur la planète rouge. L’espèce humaine y a installé des colonies depuis quelques générations, mais une série de catastrophes a comme qui dirait un peu tout chamboulé ; deux groupes se font la guerre pour le contrôle des zones les plus fertiles, les idéalistes rouge vif d’Abondance, et les gens réglos de chez Aurora. Au milieu de cette relative anarchie, les Technomanciens, parce qu’ils ont des pouvoirs que les autres n’ont pas, jouent bien souvent les premiers rôles.

screenVous incarnez Roy, l’un des Technomanciens, ou plus exactement un ex-Technomancien qui a été renvoyé du front pour se retrouver dans une prison du Camp 19, au milieu de nulle part. Dès le début du jeu, alors que la guerre touche à sa fin, le bon Roy va sauver le jeune Innocence d’une initiation sexuelle par trop rapide dans les douches de la prison. Ensemble, Roy et Innocence fomenteront un plan d’évasion, avant de suivre des chemins différents et, peut-être, de se retrouver au beau milieu d’une lutte de pouvoir entre Aurora et une mystérieuse Résistance.

Le scénario de Mars : War Logs est très attirant sur le papier. Dans le premier des trois chapitres de l’aventure, on devine un background plus qu’intéressant, on voit se mettre en place les rouages d’une aventure qui aurait toutes les chances d’être passionnante, on comprend que les quatre premières heures de jeu n’ont été qu’une belle introduction quand on finit par rencontrer la Résistance. Beaucoup de potentiel, oui, mais qui restera malheureusement, autant le dire, lettre morte. L’histoire ne décolle jamais véritablement dans Mars : War Logs, ou bien, quand elle s’anime, elle le fait maladroitement et ne fait qu’esquisser certains thèmes qu’on aurait aimé voir plus amplement se présenter.

 
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screenIl s’agit moins d’un scénario à rebondissements que d’un scénario en forme de brouillon. Un brouillon qui pourrait donner un très bon scénario, répétons-le, mais qui, en l’état actuel, déçoit fortement. Manque de temps ou de moyens ? Sûrement. Les personnages rassemblent ainsi une série de clichés (Roy, le repenti expérimenté, Innocence, le crédule idéaliste…), à l’exception peut-être de Mary, une technomancienne à la psychologie torturée qui se baladera à vos côtés à moitié nue. Il reste que le jeu, après une première partie dont on pourrait dire qu’elle ne forme qu’un prologue élargi, sans véritable déclencheur, finit par se complaire dans des mises en scène précipitées et des propos confus ou naïfs. La seconde partie du jeu, qui nous transporte à Shadowlair, une métropole, ne trouve son rythme de croisière qu’en nous éloignant du scénario principal.

screenLa troisième partie ne fait pas beaucoup mieux. La Résistance devient finalement un passe-partout scénaristique qui permet d’opposer clairement un camp des bons (qui défendent la démocratie, la liberté, etc) et des méchants (les oppresseurs d’Aurora). Le jeu enchaîne alors les clichés, comme s’il n’avait plus rien à proposer. Le manichéisme est heureusement moins marqué si l’on décide, à la fin du deuxième chapitre, de prendre le parti d’Aurora, sans pour autant se révéler enthousiasmer au final. Car en effet, Mars : War Logs propose un troisième acte sensiblement différent (au niveau de l’histoire, des quêtes et des environnements) selon un choix du joueur à la fin de la deuxième partie. Mars : War Logs entend ici s’inspirer d’une longue tradition dans les RPG, reprise et magnifiée notamment par la série des The Witcher.

 
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screenLa comparaison avec la série de CD Projekt ne s’arrête d’ailleurs pas là. On sent une grosse inspiration de Spiders puisée chez leurs homologues polonais. Mais même pour ce qui est des parties du jeu où le budget joue moins, Mars : War Logs n’arrive pas à se montrer convaincant. On pardonnera aux trois environnements principaux du jeu leur cloisonnement, leur extrême linéarité – Shadowlair est surtout constitué de couloirs, degré zéro du level design -, ces agaçantes ouvertures de portes qui font office d’indispensables zones de transition pour le faiblard moteur de jeu. On pardonnera encore l’absence de voix françaises (contrairement à ce que laissent penser nos screens, le jeu est bien sous-titré en français, c’est juste que je préfère jouer en anglais pour réviser les insultes dans la langue de Shakespeare), on pardonnera tout cela, eu égard des moyens du studio.

screenLe problème, c’est que Mars : War Logs ne se rattrape pas là où on l’attendait : l’ambiance des environnements pâtit du cruel manque d’animation de PNJ amorphes ou totalement muets ; la direction artistique, enfermée dans une uniformité de bleu, de rouge foncé et de gris, déçoit le plus souvent ; l’écriture des quêtes souffre d’une vulgarité gratuite ou de clichés bien trop présents, hormis quelques exceptions bien senties. Rien qui ne puisse rattraper le manque d’épaisseur du scénario. En tant que jeu à petit budget, Mars : War Logs jouait pourtant son va-tout sur ces points.

Il aura donc bien du mal à compenser ces faiblesses par sa réalisation ou par son gameplay, encore une foi affectés par le manque de moyens – ou le surplus d’ambition ? – du studio français. Le Silk Engine a donc quelques années de retard, les animations sont rigides, la plupart des textures datées, les personnages ont bien du mal à nous faire ressentir leurs émotions. On insiste alors sur les effets de lumière (notamment dans les cut-scenes) pour masquer les imperfections du moteur, jusqu’à l’excès.

 
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screenLe gameplay repose quant à lui sur des bases plutôt bancales. Mars : War Logs emprunte ainsi beaucoup à The Witcher, mais ne convainc que très imparfaitement. L’action est donc en temps réel, mais Roy est trop rigide, voire carrément trop lent, pour donner véritablement du peps à l’action. Les ennemis frappent plutôt fort, aussi Roy peut et doit contre-attaquer ou faire des roulades pour esquiver les coups : les roulades sont finalement bien plus efficaces, et la technique sera plus ou moins la même, c’est-à-dire faire un ballet de roulades, taper un coup (ou tirer au pistolet), et recommencer. La hitbox des ennemis est d’ailleurs sujette à caution, vu que ceux-ci vous atteindront parfois alors qu’ils ne le devraient manifestement pas.

screenA la fin du premier chapitre, Roy débloque les pouvoirs de Technomancien (bouclier, étourdissement, foudre, électrification de l’arme, et un pouvoir caché, Overdose), ce qui diversifie et facilite en même temps les affrontements. Il y a bien effet un versant infiltration, mais le jeu ne donne jamais vraiment l’occasion de l’exploiter. Et si un compagnon peut vous accompagner, ne comptez pas vraiment sur lui : sac à patate sans beaucoup d’espérance de vie, il ne tardera pas à vous lâcher. L’I.A. des compagnons (tout comme d’ailleurs celle des ennemis) n’est pas brillante, en particulier pour Mary, peut-être plus dangereuse pour Roy que pour ses adversaires. Le système de lock n’est enfin clairement pas des plus pratiques.

 Une nouvelle fois comme The Witcher, Mars : War Logs propose donc trois voies différentes : le  corps à corps, l’infiltration (moins conseillée), ou la technomancie (la voie la plus intéressante à  nos yeux). Bon point : on ressent réellement une montée en puissance du personnage et c’est  peut-être ce qui nous fera avancer, à défaut du scénario. Là où l’alchimie tenait une place  prépondérante dans le jeu de CD Projekt, dans le jeu de Spiders, c’est le crafting qui vous  occupera. Roy ne pourra en effet s’équiper que de barres à mines ou armes de fortune  semblables, améliorables, tout comme ses armures, par une série de pièces trouvées ou fabriquées. Le système, attirant de prime abord, se révèle hélas plus limité qu’espéré. Pour peu qu’il se donne la peine de fouiller un tantinet, le joueur ne manquera jamais de nécessaire à craft.

 
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 Après ce tableau, on accueillera avec une certaine lassitude, voire quelque exaspération, une  foule de détails agaçants qui ne peuvent trouver leur excuse dans les limites budgétaires de  Spiders, si étroites soient-elles. Mars : War Logs n’en avait pas besoin, et pourtant il enchaîne à  peu près tout ce qu’il faut éviter dans un RPG : un scénario décevant, voire manichéen et mièvre,  on l’a dit, mais aussi, au choix, des quêtes « Fedex » qui vous feront traverser et retraverser les  couloirs des environnements, un système de réputation sans grand intérêt, des animations dont le  moteur de jeu peut se passer mais qu’on passera mille fois dans le jeu (les loots sur les cadavres nous permettant de retirer le Sérum, la monnaie du jeu)…

Le soft souffre enfin de quelques problèmes de collision et de bugs, dont un tout particulièrement fameux. Mesdames et messieurs, Mars : War Logs invente en effet l’auto-spoil. Un bug dans les choix de dialogues m’a en effet fait annoncer une « révélation » de la fin du troisième chapitre, au beau milieu de celui-ci, par le personnage en question. Il est d’ailleurs plaisant de voir que Roy a dû attendre la fin du jeu avant de s’en émouvoir.

La durée de vie du titre s’en retrouve d’ailleurs artificiellement gonflée. Elle n’en avait peut-être pas besoin. Pour 19,99 €, Mars : War Logs propose donc une aventure d’une douzaine d’heures, mais avec un fort potentiel de rejouabilité pour qui sera tenté d’explorer le second arc narratif du troisième chapitre et / ou une autre voie de gameplay. Encore faudra-t-il le vouloir, pour être honnête.

 
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 Nous aurions été ravis de mettre une excellente note à Mars : War Logs. Ravis de féliciter un jeu  créé par des gens qui, défaut d’argent, auraient pu compter sur leur passion pour rendre un jeu  bancal ou banal attirant rien que pour ses qualités scénaristiques ou immersives. Hélas, Mars :  War Logs ne demeure qu’une esquisse, un brouillon dont l'inachèvement est loin de s'expliquer  uniquement par son budget. Le scénario, quand il commence enfin, se précipite et finit par  s’embourber dans les lieux communs. Et puisque ni l’ambiance ni l’écriture n’ont la maturité pour  encaisser le choc, Mars : War Logs n’a donc plus grand-chose pour lui.

On n’attendait pas Mars : War Logs sur ses graphismes ou son gameplay. On aurait passé l’éponge si l’aventure avait été tout simplement plaisante à suivre. Ce n’est pas le cas. Mars : War Logs se crashe sur le mur d’un jeu trop mou ou trop rigide. D’une grosse-production RPG, Mars : War Logs n’en retire finalement pas le meilleur (la réalisation, le graphisme), mais peut-être bien le pire (la platitude du scénario, principalement). Pour les absolus drogués désespérés du RPG, on conseillera même d’attendre un prix réduit de moitié. Mars : War Logs aura du mal à exister. Mais puisqu’il s’est montré plus que paresseux là où il était attendu, on ne criera pas à l’injustice.

 

 
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Mars : War Logs (PC, PS3, 360)

Plateformes : PC - Xbox 360 - PS3

Editeur : Focus Interactive

Développeur : Spiders

PEGI : 18+

Prix : 19,99 €

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