Publié le Samedi 24 novembre 2018 à 12:00:00 par Paf!
La chronique cinéma de Paf ! : Ce qui ne me tue pas
Devinez qui nous revient ?
Et en grande forme !
Non, non, je ne parle pas de Paf ! qui, ayant gagné un concours de circonstances, s’est retrouvé avec le premier prix – son poids en whisky – et donc avec une bouteille de 12 ans d’âge soudée à la main droite depuis plus d’un an. Navré, hic, de vous avoir par conséquent laissé sans ces chroniques ciné Gam@live parfois incohérentes, souvent remplies de phrases longues, mais toujours pertinentes à Brest.
Toujours aussi con qu’un canal, ce Paf !
Sauf que récemment, après moult essais – j’ai niqué quatre claviers avec mes tentatives de vous correspondre : ce sont toujours les consonnes et la bouteille qui gagnaient -, j’ai compris comment je pouvais vous donner de mes nouvelles quand j’arrive à m’échapper de l’institution pour aller en salle obscure : je les dicte directement à l’infirmière en rentrant !
Bon, c’est sûr, d’ici peu, elle en aura aussi marre que Dora, mais si vous me laissez plein de commentaires aimants ou haineux comme avant, peut-être que mes enfants finiront par me reconnaître et par taper mes chroniques à ma place. Chi lo sa…
Non, en fait, je vous parlais d’une copine : Lisbeth, lesbienne suédoise par vocation et hackeuse professionnelle par distraction.
Mademoiselle « Fifi Brindacier 2.0 » est de retour et virevolte autour de nos masculinités, et plus si inimitiés.
Si vous n’avez encore rien vu du film, ne regardez de préférence que cette bande annonce svp car les autres vous montrent beaucoup. Trop beaucoup. D’autant que celle-ci vous remet dans le bain Noomi Rapace / Rooney Mara sans trop vous dépayser :
Avec « Ce qui ne me tue pas », voilà donc que nous reviennent les dragon tattoos, les barils d’essence et les nids de frelons chers au grand disparu Stieg Larsson. Depuis son décès, c’est David Lagerkrantz qui a repris le flambeau de l’écriture et j’avoue n’avoir pas lu ses livres. Ils sont de commande, ils sont nés pour faire du fric, mais bon, il est parait-il des terres brûlées donnant plus de blé qu’un meilleur avril. Et puis, c’est aussi bien pour les amateurs de l’adaptation ciné : l’histoire est nouvelle et n’a pas à entrer dans nos schémas de lecteurs. N’est pas David Fincher qui veut pour transcender en mieux un bouquin déjà excellent.
Côté réalisation, c’est donc l’uruguayen Fede Alvarez qui s’y colle. Il m’avait bien plu avec sa série B d’angoisse « Don’t breathe » (je me suis toujours refusé jusqu’à présent de voir son remake d’« Evil dead » même si Sam Raimi était à la production) et l’extraordinaire court-métrage qui l’avait fait connaître en 2009 : « Ataque de Pánico! ».
Le petit cinéaste prodige nous livre ici un très beau produit de grande consommation pour adultes, beaucoup plus porté sur l’action et moins noir et glauque que ses prédécesseurs suédois et américains en milléniumeries. C’est là - pour mon goût personnel en tout cas - où le film pêche par rapport à ses prédécesseurs : il gagne en dramaturgie cinétique ce qu’il perd en sombre humanité. Après la trilogie suédoise fort bien faite, le Fincher était de ce point de vue un chef d’œuvre absolu, aussi tendu en suspens dramaturgique qu’en images empathiquement choquantes : le viol de Lisbeth par son tuteur, puis son inverse,… et enfin la pendaison-torture de notre meilleur James Bond et cette petite fille venant le sauver du serial Killer en demandant à Daniel Craig d’une petite voix suppliante : « May I kill him ? ».
Bref, à part avec « Seven », « Fight club », « Zodiac », « The social network» ou le chef d’œuvre trop méconnu « Gone girl », le cinéma hollywoodien de grand spectacle avait rarement atteint un tel degré de noirceur et de perfection*. Gloire soit rendu au grand Fincher avant que d’encenser le petit Alvarez.
L’uruguayen commence d’ailleurs son film par un générique qui n’est pas sans rappeler celui du Fincher, ni certaines séquences de l’Alien3 du même, et s’éloigne après du maître: la photo de son film est en effet très lumineuse et la plupart des scènes se passent de jour quand Fincher avait opté pour le crépuscule et la nuit.
Mais bon, cela n’empêche pas « Ce qui ne me tue pas » de flirter avec le sombre…
Car qui l’eut cru ?! On découvre dès l’ouverture du film que le père de Lisbeth était un fieffé salopard : un psychopathe pédophile et incestueux, allié à une mafia russe des plus brutales. Cela nous vaut d’ailleurs une séquence mémorable d’une de leurs victimes faisant un strip-tease facial assez insoutenable ! Enfants et personnes sensibles s’abstenir !!! Contrairement aux autres romans et films, c’est Lisbeth qui est ici l’héroine et non son ami journaliste et qui s’en plaindra parce qu’on aime surtout Millenium pour Lisbeth, n’est-ce pas ?, et que l’acteur suédois qui joue Blomqvist est assez falot. Claire Foy ne démérite pas par contre même si elle nous offre une Lisbeth plus humaine et moins autiste que les Mara et Rapace l’ayant précédé. Dommage… Le rouleau compresseur de la production des blockbusters est passé par là.
Coiffure y compris, tout se passe comme si Lisbeth avait un peu muri et avait réussi à sortir de sa coquille, même s’il y a de très jolies scènes de cigarettes où elle se recroqueville en fœtus au milieu d’autres humains. La fin du film la verra d’ailleurs dans la même position mais inversée : sans pouvoir respirer. J’ignore qui a eu l’idée de momifier latex cette ennemie des pratiques sado-maso mais c’est du grand art ! Dans le même ordre d’idée, Lisbeth a désormais des amis (ou presque) et ne parle plus aux gens en les agressant verbalement. Adieu donc l’autiste psychopathe illisible, voici venir une Lisbeth Salander à l’américaine, plus apaisée, petite sœur suédoise des Bourne, Bond, Hunt. Nul doute qu’on est parti pour une saga…
Et ce n’est pas moi qui m’en plaindrai puisqu’au final, « Ce qui ne me tue pas » est un blockbuster de très grande qualité distractive, avec plein de trucs de hackers**, plein d’high-tech, plein de poursuites en voiture et moto, … et plein de morts. Et Fede Alvarez s’en sort magnifiquement bien pour un public américain : des scènes James bondiennes parfois très violentes mais toujours magnifiquement filmées et pas un seul téton apparent malgré le fait que Lisbeth n’arrête pas d’enlever son T-shirt après s’être pris une grosse coupure dorsale nécessitant plein de points de suture. Bon, je vous rassure, elle les soigne à la super glu et à l’agrafeuse de bureau, ce qui nous change du fil dentaire de Fincher.
* J’exagère ici pour rendre hommage à Fincher bien sûr mais il est vrai que la production américaine n’est pas une grande spécialiste du très grand cinéma intelligent pour adulte. Sur la même période, nous avons cependant eu notamment « Mystic river » (2003) de Clint Eastwood ou « La vérité nue » (2005) d’Atom Egoyan pour Le cinéma américain de grand studio et « Little children » (2006) de Todd Field ou « We need to talk about Kevin » (2011) de Lynne Ramsay pour les indépendants.
** Gamers de gam@live, vous arrivez à faire cela, vous ? : court-circuiter une voiture en marche et/ou hacker le plus performant des systèmes de sécurité de la NSA?
Commentaires
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Bien documentée, comme toujours.
Et celle-ci va me faire faire des cauchemars, tu auras cela sur ta conscience !
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