Publié le Dimanche 4 juillet 2021 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du Dimanche

Amours adolescentes

Ma fille a 16 ans et elle est entrée dans sa phase des amours débutantes et de la découverte de son corps. Et surtout de celui de petit copain.
Alors vous me connaissez, hein : Je ne suis qu’amour, bonté et tendresse. Mais avoir une fille de 16 ans, ce n’est pas tous les jours facile pour un papa. Y’a des trucs, on n’a pas vraiment envie de savoir, en fait.

Pourtant, honnêtement, à part une ou deux petites conneries sans gravité faite ici et là comme tous les ados en font, j’ai la chance d’avoir une gamine bien comme il faut et, qui plus est, nous parle de tout à sa mère et moi. Pas de (grosse) cachotterie mais un vrai lien parent-enfant qui permet, finalement, d’être dans une relation de confiance.
Bon, pas totale, la confiance, hein. C’est une ado quand même alors faut pas déconner. Mais confiance quand même. Ça ne veut pas dire non plus qu’on est dupes sur certaines choses ou que l’on baisse notre vigilance, mais la relation est chouette.

Il n’empêche. Voir grandir sa gamine, c’est parfois rude. Et je vous jure que j’ai mis tellement d’eau dans mon vin que j’ai transformé un château Cheval Blanc en Cristalline. Je serre les dents, je souris et je reste cool.
Parce que soyons sincère. Comme tous les pères, tout aussi amour, bonté et tendresse sois-je, j’aurais parfois envie de choper le prétendant contre un mur et de lui expliquer avec un grand sourire de psychopathe que ma fille, c’est une déesse, qu’il doit la traiter avec une dévotion et un respect sans borne, parce que sinon, retourner en prison, perso, ça ne me dérange pas, que lui n’a sûrement pas envie de vivre le restant de sa vie sans genou et à uniquement pouvoir ingurgiter des éléments liquides avec une paille et que toute aussi formidable soit-elle, ma fille n’aura certainement pas envie de rester à 16 ans avec un mec dont elle doit changer la poche à caca toutes les deux heures.

Mais je me tais. Je prends sur moi. Ça ne m’empêche pas de lancer des regards qui veulent dire la même chose, hein. Mais ce n’est pas tout à fait pareil. Je sers les dents. Et c’est un pur hasard, je vous assure, juré, craché, pfiout, si je suis soit en train d’aiguiser mes couteaux, soit en train de nettoyer ma batte de baseball, quand il vient chercher ma gamine à la maison.

Elle a surtout la chance d’être tombée, actuellement, sur un petit gars bien. Enfin, à moins que ne soit lui, en fait, qui a de la chance d’être un petit gars bien. En tout cas, il est poli, très attentionné et il laisse le temps à leur relation de s’épanouir. Franchement, je ne pense pas qu’elle aurait pu tomber mieux pour ses premières amours sérieuses.

Mais je vous dis. Ce n’est pas facile tous les jours de voir son petit bout de chou qui hier encore venait se blottir contre vous dans le canapé pour regarder Ratatouille, devenir une femme.

C’est dans l’ordre naturel des choses, me direz-vous. Je sais. Mais j’suis pas obligé d’aimer ça non plus.

En attendant, je reste là. Jamais très loin non plus. A essayer de trouver le bon équilibre entre libertés et limites à ne pas franchir. A ne pas céder sur certaines choses parce que putain, elle n’a que 16 ans quand même. Et à laisser faire d’autres choses parce que putain, elle a 16 ans quand même.

Sur ce.

Je vais aller me remater Ratatouille, tiens.