Publié le Dimanche 11 septembre 2016 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du dimanche

Grenade !

Depuis bientôt un an, maintenant, la France vit dans un climat de peur et de haine assez stupéfiant. Ah ils sont loin, les beaux discours de « le terrorisme ne gagnera pas » et autres « continuons de vivre normalement pour leur prouver que même pas peur, hé ».
Sous les consignes strictes d’un gouvernement paniqué, chacun tremble dès qu’il doit aller dans un lieu public fréquenté. C’est bien simple, même au supermarché, on sent bien que les clients se demandent, avant de prendre un concombre, s’il n’est pas relié à un dispositif explosif.
Tenez… rien que vendredi soir. Nous faisions nos courses hebdomadaires avec ma femme. Elle était au rayon des salades, moi à celui des fruits, éloigné d’une dizaine de mètres. J’avais pour mission de prendre des pêches, les plus mûres possibles (une pêche mûre en supermarché d’Île-de-France, ça veut dire super dure et qui moisit avant d’être comestible).
« Grenade ? » m’exclamais-je, ayant soudain l’idée d’un dessert pour agrémenter les repas du week-end, dessert que les arilles rouges vifs au parfum délicat de ce fruit d’origine asiatique pourraient relever de belle manière.

J’ai eu tout à coup l’impression qu’on me regardait bizarrement et ai même noté deux ou trois ménagères fuir à grandes enjambées le rayon fruits et légumes… On ne sait jamais, hein. Des fois que j’aie décidé de me faire péter en gueulant « Allahou Wakbar » au beau milieu des abricots, parce que Dieu est grand, même en pleine confiture et avec un noyau qui lui pète au visage.

La peur est partout et dans toutes les pensées. Je ne compte plus les manifestations annulées. Le nombre de vide-greniers, brocantes, fêtes du village, et même feux d’artifice qui n’auront finalement pas lieu sur demande expresse de la préfecture et pour raisons de sécurité… c’est hallucinant. Vous n’imaginez même pas. Des dizaines d’évènements n’auront pas lieu. Les entreprises liées à l’évènementiel ferment les unes après les autres, ou licencient à tour de bras.

Mais sinon, hein, le terrorisme ne gagnera pas. Continuons de vivre normalement.

Alors je peux comprendre les réticences, notez bien. Pour ne pas « tenter » les tarés et autres suicidaires de tout poil. D’autant plus que, on a beau aimer, en France, se croire supérieur aux américains que l’on montre toujours comme de gros débiles dégénérés, on ne vaut finalement pas beaucoup mieux, à faire un procès pour tout et n’importe quoi. Il faut absolument des coupables, pour tout, parce qu’être victime du hasard n’est plus concevable et que la responsabilité doit être obligatoirement imputée à autrui.
Du coup, pas de manifestation, pas d’évènement, c’est zéro risque pour les organisateurs, la police ou les politiques.

Bref, sous la pression de quelques illuminés, tout change. Notre culture a pris du plomb dans l’aile. Nos valeurs également.

Il suffit que trois connasses entassent des bonbonnes, dans une bagnole, et la laissent en warning en plein milieu de la rue le temps d’aller pisser… une voiture sans plaque et avec des documents écrits en arabe bien visibles sur le siège avant, c’est dire le niveau d’intelligence, pour que la France se remette à trembler, pour que les femmes voilées soient insultées dans le métro ou dans la rue, voire pire (crachats, jets de pierre…). Même les oiseaux migrateurs, désormais, on s'en méfie.
La peur pousse à l’extrême. Et à bafouer les notions les plus basiques de morale et d’intelligence. Et pire, on se met à l’accepter.

La dernière fois, alors qu’une vieille conne déblatérait tout haut sur les « arabes », un confrère me lançait que « oui, c’est honteux ce genre de propos, mais c’est pas surprenant aujourd’hui, ça se comprend… ».
Mais non putain. Ça ne se comprend pas. Faut lui retourner une bonne grosse baffe dans sa gueule à la vieille pour lui apprendre la définition du mot « amalgame ».

Alors non. Je n’ai pas de solution. Je n’ai ni recette miracle ni grande déclaration qui va changer le visage de notre pays. Je ne fais que constater, en me désolant, de la morosité ambiante, témoin d’une situation qui se dégrade de jour en jour.

Je vous préviens juste, hein. Avoir une femme président, en théorie, ça ne me gêne pas. Mais déconnez pas, hein. Pas celle-là… Faites pas les cons.